Brexit, un prévisible sans certitude

Publié le 3 avril 2019 à 16h57

Paras Anand

Le contenu des clauses de sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne est en perpétuelle négociation. Mais puisque Theresa May a obtenu un délai supplémentaire de la part de Bruxelles, il est important de prendre du recul et de s’interroger plus largement sur le manque de clarté lié au Brexit. Alors que de nombreux investisseurs ont volontiers payé une prime de prévisibilité sur la sortie du Royaume-Uni ces dernières années, cette incertitude sur la façon dont elle se fera offre une décote avec des rendements à la clé.

Le fait que le Brexit ait offert aux investisseurs une opportunité de long terme sur les actions britanniques crée aujourd’hui un vrai débat. Heureusement, les dividendes de l’indice, déjà attractifs, sont en grande partie versés grâce aux flux de trésorerie libellés dans des devises autres que la livre sterling, ce qui constitue une couverture partielle contre la faiblesse de la devise locale.

Il est important de noter que la réticence des investisseurs à accepter l’incertitude liée aux actions britanniques (et qui joue en faveur de régions plus chères mais plus prévisibles), présente des similitudes avec un certain nombre d’autres marchés.

Depuis quelques années, les investisseurs privilégient la préservation du capital autant, sinon plus, que les plus-values. Cela peut s’expliquer en partie par la hausse d’épargnants vieillissants. 

Mais il existe également un sentiment de fragilité économique et systémique suite à la crise financière, qui a entraîné une aversion profonde pour les pertes et la volatilité. La prévisibilité d’un actif se paye plus chère que la décote entrainée par l’incertitude. On peut même affirmer que cette réalité s’est étendue aux récentes préférences des investisseurs pour les actifs illiquides tels que le Private Equity, la dette privée et les infrastructures, où l’absence de recherche de valorisations à court terme réduit le niveau de volatilité auquel ils sont soumis.

Sur les marchés côtés, les secteurs ayant enregistré les principales décotes sont ceux où l’incertitude a été la plus élevée : les récentes élections au Brésil, la santé de l’économie chinoise où la confiance dans les données publiées est faible, les titres américains « value » où « bon marché » est devenu synonyme « d’échec » ; de même que l’impact du Brexit sur les actions britanniques. Pendant la majeure partie de ces dix dernières années, la valorisation a été un indicateur très approximatif des performances futures puisque cette polarisation entre prévisible et incertain s’est accrue.

Mais cette dichotomie ne sera pas éternelle. Au-delà des préférences d’investissement à court terme et de la plus forte participation d’acteurs insensibles aux prix (Banques Centrales, stratégies passives), les prix des actifs finiront par converger vers les fondamentaux. En outre, il est probable que bon nombre des secteurs dans lesquels les investisseurs se sont précipités pour se protéger des risques s’avèrent beaucoup moins prévisibles avec le temps, tandis que ceux perçus avec un degré d’incertitude élevé ont peut-être déjà intégré une bonne partie du potentiel baissier.

C’est particulièrement vrai lorsque l’on considère un indice global plutôt qu’un titre spécifique.

S’agissant du Royaume-Uni, les investisseurs seraient bien inspirés d’adopter une « vue d’ensemble ». Plutôt que de s’enliser dans la complexité du Brexit, qui sera en tout état de cause un processus sans conclusion claire, il est préférable de considérer cette incertitude comme une référence, applicable à d’autres scénarios. Nous estimons que les actions britanniques affichent une valorisation attractive, comme c’est le cas pour les autres classes d’actifs qui affichent un degré d’incertitude élevé à moyen terme.

Paras Anand

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