Comment fonctionnera la démocratisation des actifs non cotés ?
La demande d’actifs non cotés ne cesse d’augmenter, et pas seulement chez les investisseurs institutionnels traditionnels. Les marchés du non coté se « démocratisent ».
Par le passé, les actifs non cotés, comme le capital-investissement, n’ont été accessibles qu’aux grands investisseurs institutionnels. Mais la situation évolue.
L’une des principales raisons pour lesquelles l’investissement dans les actifs non cotés est jusqu’à présent resté hors de la portée des investisseurs privés réside dans la nature des transactions. Il peut s’avérer chronophage de trouver des transactions, complexe de les structurer, tandis que les rachats peuvent prendre beaucoup de temps et poser leurs propres difficultés.
Toutefois, la demande des investisseurs privés s’accroît. De nombreux grands gérants d’actifs non cotés qui ne s’adressaient auparavant qu’à une clientèle institutionnelle développent des produits plus accessibles. Pourquoi ce changement ? Que cela signifie-t-il pour le secteur ? Que cela implique-t-il pour les petits investisseurs privés ?
Les réponses se trouvent dans les évolutions des produits, des technologies et de la réglementation qui ouvrent les portes de l’investissement dans les actifs non cotés.
Hausse de la demande, à laquelle l’offre répond
La croissance relative aux investisseurs fortunés devrait être plus rapide que les sources traditionnelles de capital, comme les fonds de dotation.
La réglementation portant sur les personnes autorisées à détenir des actifs non cotés a commencé à s’assouplir, tandis que les technologies contribuent dans le même temps à lever les barrières liées au manque de liquidité. Cela signifie que l’offre de véhicules d’actifs non cotés que les investisseurs privés peuvent utiliser augmente rapidement.
Comment les produits ont-ils évolué ?
Bien que les fonds semi-liquides aient procuré un meilleur accès au marché à certains investisseurs, il existe un certain nombre de stratégies d’investissement qui restent plus accessibles via des fonds fermés. Il existe également un haut niveau d’innovation dans ce domaine.
L’un des domaines de croissance les plus rapides a concerné le lancement de fonds fermés sans fenêtres de liquidité ou avec fenêtre de liquidité périodique. Un certain nombre de nouvelles plateformes digitales ont été lancées ces dernières années, qui permettent aux investisseurs privés d’accéder à un large éventail de stratégies d’actifs non cotés par l’intermédiaire de fonds nourriciers.
La technologie a contribué à réduire une grande partie des coûts et de la complexité liée à l’offre de ces fonds nourriciers aux nouveaux investisseurs.
Comment la technologie apporte-t-elle sa contribution ?
La technologie a été un catalyseur important de la démocratisation des actifs non cotés à différents égards.
Elle a notamment permis le développement de nouvelles plateformes qui aident les entrepreneurs à lever des capitaux auprès d’investisseurs privés apportant du capital d’amorçage, alors qu’ils étaient auparavant cantonnés à des amis et à la famille. Les entrepreneurs peuvent présenter leurs idées et start-ups à des investisseurs privés qui peuvent choisir le montant à investir, même s’il s’agit de faibles montants. Des concepts similaires s’appliquent à l’immobilier.
Le concept s’est également étendu à la dette privée, qui constitue traditionnellement le domaine exclusif des banques et des prêteurs spécialisés. Les investisseurs privés peuvent choisir d’accorder des prêts à des particuliers ou à des entreprises afin d’obtenir des rendements plus élevés que ceux offerts par les comptes d’épargne traditionnels ou des obligations.
La technologie a aussi ouvert l’accès aux actifs non cotés par le biais de nouveaux canaux de distribution et de communication. L’enregistrement des nouveaux investisseurs, qui s’appuyaient auparavant sur un réseau d’agences ou devaient passer par la constitution d’un dossier papier, est désormais automatisé, ce qui réduit ainsi les délais et les coûts de l’entrée en relation. Le reporting peut de même être numérisé, ce qui permet de réduire les coûts pour les gestionnaires d’investissement afin de le rendre plus économique pour les petits montants de souscription.
Parmi les nouvelles innovations qui contribueront à soutenir encore davantage l’ouverture des marchés des actifs non cotés, il y a la perspective de « tokenisation », qui peut offrir aux investisseurs de nouvelles façons d’accéder à des actifs non cotés sans certaines restrictions que les structures de fonds peuvent parfois appliquer. En étant en mesure de fournir aux investisseurs un droit de propriété numérique sur un actif à l’aide de la technologie de la blockchain, le coût de détention d’une part de la propriété d’un actif diminue significativement pour l’investisseur. Cela apporte par ailleurs plus de flexibilité en matière de liquidité.
Évolution de la réglementation pour faciliter l’accès aux actifs non cotés
La réglementation pose toujours des défis à la démocratisation des actifs non cotés et les évolutions réglementaires sont inégales selon les marchés. Toutefois, de nombreux gouvernements reconnaissent que le rôle croissant du capital privé est important pour la croissance économique et la création d’emplois. Les investisseurs particuliers apportent une source de capital à une économie. L’accent est de plus en plus porté sur la mise à jour des réglementations afin de faciliter l’accès et de garantir que les investisseurs particuliers puissent profiter des rendements historiquement plus élevés des actifs privés.
Toutefois, compte tenu du rythme d’évolution de la technologie et de l’innovation, cela a conduit à des situations où les contraintes réglementaires peinent à être appliquées pour l’objectif initialement visé. C’est un équilibre délicat que les régulateurs doivent trouver pour ouvrir l’accès tout en veillant à ce que leur rôle principal de protection des investisseurs soit maintenu.
Perspectives
Il semble certain que la démocratisation des actifs non cotés se poursuivra. Le rythme de ce mouvement sera déterminé par les facteurs macroéconomiques et l’évolution de l’environnement réglementaire.
L’accès et la liquidité continueront d’évoluer et favoriseront encore davantage l’ouverture de ce marché. Il est intéressant de noter que ces évolutions mènent également à une situation où la distinction entre actifs cotés et non cotés devient moins prononcée et où le statut de propriété pèse moins dans la stratégie d’investissement. Nous assistons déjà à cette évolution en parallèle avec le développement des fonds publics-privés.
Tim Boole est Responsable Produits de Capital-Investissement chez Schroders Capital