De l’importance d’investir de manière responsable

Publié le 11 septembre 2024 à 15h47

Hans Stoter    Temps de lecture 5 minutes

L’investissement responsable fait encore face à de nombreuses critiques, souvent injustifiées. Des signaux clairs indiquent pourtant que l’économie mondiale a débuté sa transition vers un modèle plus durable et équitable, qui devrait se poursuivre au cours des prochaines décennies. Certains estiment que les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance, communément dénommés par la mention « ESG », riment avec écoblanchiment. D’autres encore, que l’ESG distrait les gestionnaires d’actifs de leur objectif fondamental : délivrer les meilleures performances d’investissement à leurs clients.

Les racines du mal

Les mauvaises performances des indices durables en 2022, alors touchés par un biais sectoriel lié au contexte global de hausse temporaire des prix de l’énergie, dans le sillage de l’invasion russe en Ukraine, ont permis aux sceptiques d’avancer que l’ESG ne serait qu’une tendance éphémère. La surperformance ultérieure des indices durables, ainsi que la sous-performance du secteur de l’énergie en 2023, aurait dû couper court à cet argumentaire, mais les marchés ont une mémoire sélective. Il faudra encore quelques années pour que l’ESG soit enfin reconnu à sa juste valeur.

Il faut néanmoins reconnaître que les confusions autour de l’ESG ont alimenté le feu des critiques. Les trop nombreuses différences entre les stratégies adoptées par les gestionnaires d’actifs n’ont pas contribué à apporter de la clarté et de la transparence au débat. Les approches des investisseurs responsables varient, allant d’une approche active et engagée à une approche non interventionniste, où il incombe au client de décider ce qu’il doit faire ou la manière dont il doit voter. Certains gestionnaires d’actifs essaient également de se positionner à cheval entre ces deux approches, en fonction du type de client ou du continent sur lequel ils opèrent. L’industrie doit collectivement progresser pour apporter plus de clarté sur l’approche de l’investissement responsable, afin de permettre aux propriétaires d’actifs et aux investisseurs de prendre des décisions éclairées.

En outre les politiques de finance durable entrées en vigueur ces dernières années dans différentes régions ont également ajouté à la confusion ambiante. Il faut désormais apporter davantage de simplicité et de comparabilité dans le paysage de la finance durable, qu’il s’agisse de mesures, d’objectifs ou de définitions.

Et après ?

D’abord, le fait d’investir dans des entreprises qui cherchent à réduire l’utilisation d’énergies fossiles est une décision rationnelle d’un point de vue économique. En effet, les entreprises qui réduisent drastiquement leurs émissions de gaz à effet de serre obtiennent des résultats à minima équivalents, mais bien souvent supérieurs à ceux de leurs indices de référence plus larges. A long terme, les efforts déployés par les entreprises pour permettre ce changement ne se font donc pas au détriment du rendement pour les actionnaires. 

Ensuite, il faut reconnaitre que beaucoup de progrès ont déjà été réalisés. La règlementation, les données, les lignes directrices et les indices de référence ont évolué afin d’aider les entreprises et les gestionnaires d’actifs à fournir des informations précises et à prendre des décisions d’investissement éclairées. Les gestionnaires peuvent choisir d’ignorer l’évolution du marché et de ses normes. Mais ignorer la transition vers la neutralité carbone équivaudrait à renoncer au budget conséquent que les gouvernements dépensent déjà pour transformer les économies, soutenir la décarbonation des grands émetteurs et supporter les entreprises fournissant les solutions nécessaires à cette transition.

Enfin, il faudra du temps pour voir des  progrès significatifs. Si de nombreuses entreprises prennent des engagements en matière de climat et mettent en œuvre des plans crédibles pour les atteindre, les détenteurs d’actifs institutionnels ne peuvent pas transformer l’intégralité de leurs portefeuilles d’investissement du jour au lendemain. Les réalités pratiques de l’intégration à cette échelle à travers toutes les classes d’actifs nécessitent de la patience compte tenu des défis à relever.

Ces critiques et le scepticisme ambiant à l’égard de l’ESG devraient significativement faiblir au cours des prochaines années. Il ne s’agit pas de faire avancer des programmes politiques ou de renoncer à des rendements, pour nous et en réalité, l’investissement responsable est simplement l’unique façon d’investir sur le long terme.

Nous croyons fermement que dans quelques années, l’ESG ne sera plus qu’un acronyme superflu. L’évaluation des risques d’une entreprise, et donc d’un investissement, prendra automatiquement en compte les risques liés au changement climatique, aux responsabilités environnementales, à la protection sociale et aux pratiques de gouvernance dans la gestion des entreprises. Tous ces facteurs, régis par la réglementation et les préférences du marché, constitueront les fondamentaux d’une prise de décision en matière d’investissement.

Hans Stoter Global Head ,  AXA IM Core

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