Inflation et Immobilier : règles d’or et exemple parisien

Publié le 31 août 2022 à 15h54

Béatrice Guedj    Temps de lecture 4 minutes

Hausse des prix de l’énergie, forte inflation et hausse des taux d’intérêt ont détérioré les perspectives aux Etats-Unis et en Europe. La stratégie de resserrement monétaire par la FED s’est accélérée, le ton se durcit impactant négativement l’ensemble des marchés. La probabilité d’une récession aux Etats-Unis et en Europe est en hausse. L’Europe est la plus vulnérable. La BCE reste tiraillée entre la lutte contre l’inflation et la stabilité de la zone euro. Les anticipations des marchés restent associées à une récession modérée en Europe. Ce scénario éviterait à l’immobilier de subir la sévère correction de 2009.

Sur le marché coté des foncières, les prix des actions ont corrigé. En Europe, la hausse des taux d’intérêt à 10 ans a comprimé les primes de risque le bureau prime, jauge de référence. Au Q2 2022, le calcul de ces primes de risque sur la base des anticipations d’inflation oscillaient autour de leurs moyennes de long terme. La moindre liquidité, conséquence du durcissement des politiques monétaires, et la plus grande volatilité, conséquence de l’instabilité de l’inflation, se diffuseront à l’immobilier. La décompression des taux en Europe ne sera pas similaire :  certains marchés sont plus mark to market et donc plus volatils.

Quid de l’immobilier parisien, stricto sensu, considéré comme valeur refuge? Il a systématiquement été plus défensif dans les phases de retournement et plus performant dans la phase de reprise du cycle économique. Depuis reprise en 2014, Paris a enregistré des performances globales bien supérieures à celles d’autres sous-marchés franciliens et européens. Outre une croissance plus élevée des rendements en capital, Paris a observé une croissance plus élevée des valeurs locatives de marché. Mécaniquement, la croissance  des revenus locatifs courants a été plus soutenu ainsi que le taux de distribution. En immobilier la règle d’or tient à peu : tant que la croissance et l’indexation compensent la hausse du taux d’actualisation, en partie via la hausse du taux d’intérêt, la hausse de la valorisation d’un actif est assurée.  

Lorsque les taux d’intérêt étaient élevés de 1974 à 1982 avec un régime d’inflation en moyenne de 11,5 % par an, les performances globales réelles de l’immobilier parisien ont été nettement positives, pour le bureau et le résidentiel. Si les cycles se suivent et ne se ressemblent pas l’immobilier parisien ferait preuve d’une plus grande résilience comparativement à d’autres marchés européens. Résilience sur le marché de la transaction car la correction en termes de prix ne serait pas aussi élevée que sur des marchés plus volatils, tel Londres. Résilience en termes de valorisation de portefeuilles, dont la dynamique est fonction des métriques tels le loyer courant, le risque crédit du locataire, la durée du bail et autres critères dont l’ESG qui s’est invité dans la grille des experts depuis la mise en place de la RT 2020. Ces variables ne sont pas décorrélées du cadre macroéconomique, dont les éléments positifs sont les suivants : la France est moins dépendante du gaz russe et son potentiel de croissance ne serait pas aussi entamé que d’autres. L’inflation en France serait inférieure à celle de la zone euro, grâce au bouclier tarifaire, variable clé pour éviter une baisse de la compétitivité et une trop forte érosion des marges. Paris bénéficie d’un profil économique diversifié. Paris a renforcé la polarisation de la demande locative depuis la crise sanitaire. Le peu d’offre sur le marché parisien limiterait la baisse des loyers de marché.

Une inconnue subsiste au niveau international : les pertes engendrées par la chute des marchés actions et obligations ont entraîné une hausse mécanique de la part de l’immobilier dans le portefeuille global des institutionnels. Certains institutionnels pourraient ainsi réduire leur exposition à l’immobilier, à Paris et ailleurs. Les « fire sales » ou ventes forcées sont synonymes de décote pour les vendeurs et d’opportunités pour les acheteurs. A Paris stricto sensu, ces « fire sales » ne seront pas légion comme cela pourrait l’être sur d’autres marchés européens.

Béatrice Guedj (Phd) Directrice Recherche et Innovation ,  Swiss Life AM

Béatrice Guedj (Phd) Directrice Recherche et Innovation chez Swiss Life AM

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