Investir dans les murs et le fonds de commerce : associer immobilier et private equity pour maîtriser  la création de valeur 

Publié le 8 mars 2023 à 16h03

Gérald Férézou et Michaël Farbos    Temps de lecture 5 minutes

L’investissement en « murs et fonds », dans le contexte actuel de mutation profonde des habitudes et des usages, offre davantage de leviers de création de valeur grâce à la maîtrise de l’exploitation, c’est-à-dire l’usage qui est fait du bien. Selon cette approche, l’actif immobilier reste attaché au fonds de commerce qu’il abrite et la performance de ce dernier permet une valorisation de l’ensemble.

Ces dernières années, les actifs non cotés ont le vent en poupe aux yeux d’investisseurs qui y associent des vertus de diversification, décorrélation et un potentiel de rendement jugé plus attrayant même s’ils demeurent des supports risqués. On assiste même à une véritable démocratisation des dispositifs d’épargne intégrant des supports de private equity. 

En focalisant la réflexion sur les placements immobiliers, il semble aujourd’hui pertinent, en ce qui concerne l’immobilier d’exploitation, de mieux contrôler l’activité sous-jacente, générée par l’exploitant du fonds de commerce. Ce mode de gestion revient à appréhender l’investissement immobilier à travers une méthodologie proche de l’univers du private equity. Les véhicules gérés abritant ces actifs seront d’ailleurs similaires. 

A la différence de l’approche des véhicules à « prépondérance » immobilière dont l’objet est la détention d’actifs dans le but de percevoir des loyers (SCPI, OPCI, SIIC, SCI), l’actif immobilier est ici considéré comme un support à l’activité économique. Sa valeur est directement corrélée à la capacité de l’exploitation à supporter un loyer pérenne, et non pas seulement déterminé à partir d’un niveau de loyer « de marché » qu’il est de plus en plus difficile d’estimer tant les activités traditionnelles se trouvent challengées ces dernières années.

Atouts de l’hybridité private equity / immobilier 

Largement pratiqué sur le segment de l’immobilier hôtelier mais globalement abandonné depuis une trentaine d’années sur celui de l’immobilier commercial – en raison d’une tendance à la stricte séparation entre bailleurs d’une part et exploitants d’autre part – l’investissement en « murs et fonds » offre pourtant davantage de sources de valeur grâce à la maîtrise de l’exploitation, c’est-à-dire de l’usage qui est fait du bien. 

En effet, cette composante apporte de la robustesse à la valeur de l’ensemble et aux rendements potentiels, là où la structuration de l’investissement autour du seul bail à loyer fixe, fut-il à long terme, n’apporte plus autant de garanties qu’autrefois. A titre d’illustration, les 3 dernières années marquées par la pandémie de Covid-19 ont profondément remis en cause le dogme d’une valeur juridique absolument garantie sur les baux. La mise à l’arrêt de l’activité économique en phases de confinement ayant appelé de nombreux reports, rééchelonnements, renégociations voire défauts de paiement des loyers versés par les exploitants aux bailleurs. Cette crise a démontré qu’en dépit de la valeur juridique d’un bail commercial, les bailleurs demeurent largement exposés aux contre-performances des exploitants. Dès lors, pour l’investisseur, une exposition complémentaire à l’activité du fonds de commerce apporte non seulement un rendement additionnel lié au résultat d’exploitation, mais aussi un levier direct pour faire évoluer positivement l’activité en l’adaptant proactivement. 

Le bail, qui était recherché comme mesure de protection pour le propriétaire immobilier, peut, en outre, accentuer le risque, car il fragilise l’opérateur en lui transférant du risque immobilier alors que l’opérateur n’est pas nécessairement capitalisé en conséquence. Par ailleurs, du fait de la création d’une propriété commerciale, il n’est pas possible pour le bailleur de reprendre la main sur son actif.

L’hybridité associant investissement immobilier et private equity concilie ainsi les atouts de deux approches qu’on ne retrouve pas dans l’univers immobilier traditionnel. Elle permet la réduction du risque propre au private equity grâce à la composante immobilière importante, tout en optimisant le potentiel de création de valeur de l’ensemble grâce à la maîtrise de l’activité. De plus, le recours aux véhicules d’investissement propres au private equity présente des intérêts sur le plan fiscal, tels que le non-assujettissement à l’IFI ou exonération d’IRPP sur la plus-value après une détention de 5 ans (sous conditions).

En rupture avec les standards reposant sur une segmentation des approches, quelques gestionnaires d’actifs et investisseurs immobiliers ont renoué avec une vision intégrale. L’immobilier d’exploitation au plus de près de l’usage peut pleinement s’exprimer grâce à une lecture partenariale associant l’investisseur immobilier et l’opérateur exploitant (dont les compétences « métier » permettent de maximiser la création de valeur). En somme, une combinaison d’expertises et de potentialités pour une maîtrise de l’exploitation de l’actif immobilier, sur toute la chaîne de valeur. 

Gérald Férézou et Michaël Farbos Gérants et associés ,  Mindston Capital

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