Investissement climat 2.0 : créer de l’alpha en accompagnant les entreprises carbo-intensives dans la transformation de leur modèle

Publié le 7 décembre 2023 à 10h28

Alexandra Christiansen    Temps de lecture 4 minutes

Exclure les entreprises dont les émissions de carbone sont les plus élevées n’est pas la bonne approche pour lutter contre le changement climatique. Une stratégie d’investissement pertinente consiste plutôt à soutenir ces émetteurs dans leur transition vers une économie verte et durable.  

Pour un investisseur soucieux de contribuer à la lutte contre le changement climatique, le but recherché vise naturellement à financer les entreprises qui permettront d’accélérer la transition vers une économie à faible émission de carbone et à haut rendement énergétique. Mais dans ce cas, comment agir le plus efficacement ? Qu’est-ce qu’une stratégie climat vraiment optimale ? Au cours des dernières années, l’investissement durable a souvent conduit les gestionnaires de fonds et investisseurs à éviter les secteurs polluants et à fuir les entreprises jugées peu performantes à l’aune des critères ESG (Environnement, Social, Gouvernance). Pourtant, exclure des portefeuilles les plus gros émetteurs est peut-être satisfaisant en théorie mais l’impact sur le monde réel sera au final limité. Au contraire, ces entreprises aujourd’hui carbo-intensives ont un rôle crucial à jouer pour parvenir à une économie à faibles émissions. 

Pour que l’investissement s’avère pertinent, les entreprises en question doivent sérieusement s’engager à faire évoluer leurs pratiques et participer à la transition verte. Elles sont fortement incitées à prendre de tels engagements sur la base d’objectifs clairs et tangibles, permettant aux investisseurs de mesurer régulièrement les progrès accomplis et de demander des comptes aux équipes de direction. Ces entreprises engagées dans un processus de transformation sont souvent les mieux positionnées pour améliorer leur notation globale pour le plus grand bénéfice des investisseurs.  

Investir dans les émetteurs dès le début de leur phase de transition 

Parmi les secteurs carbo-intensifs[1], les producteurs d’électricité (40% des émissions totales), l’industrie (25%), les transports (21%), la construction immobilière (8%) et les activités agricoles et forestières (6%) ont un rôle clé à jouer pour parvenir à l’émergence d’une économie plus durable. Par exemple, l’industrie de l’acier, grande émettrice de carbone, est encore perçue négativement par les investisseurs ESG. Or, l’industrie sidérurgique est indispensable à la réussite de la transition énergétique. Un parc éolien offshore ou une centrale photovoltaïque requièrent davantage d’acier qu’une centrale conventionnelle au charbon ou au gaz. Ainsi, la décarbonation du processus de production de l’acier est une thématique à regarder de près pour qui s’intéresse à la croissance verte. 

A cet égard, il convient de s’intéresser aux acteurs dont le potentiel d’amélioration de leur profil environnemental s’avère significatif plutôt que de se concentrer sur des entreprises qui pour des raisons diverses ne peuvent pas ou ne veulent pas s’inscrire dans cette dynamique. De même, à l’autre bout du sceptre, il est préférable d’éviter celles qui contribuent déjà à la décarbonation de l’économie et sont alignés sur les objectifs de l’Accord de Paris. L’approche la plus pertinente consiste alors à investir dans des entreprises émettrices de carbone et qui sont encore au début de leur phase de transition. 

L’enjeu est de permettre à des émetteurs qui ont un impact négatif sur l’environnement et le climat de réussir leur transition énergétique tout en offrant  aux investisseurs désireux de les accompagner des opportunités de croissance attractives. Trop d’entreprises délaissées par le marché, au nom des vertus de la finance responsable, ont un rôle essentiel à jouer pour réussir cette transition. Il s’agit au contraire de les guider, de libérer leur potentiel de création de valeur au moyen d’un accompagnement exigeant et sur mesure. 

[1] Source: *International Energy Agency (2021), Net Zero by 2050, IEA, Paris. 

Alexandra Christiansen Gérante du fonds Nordea 1 – Global Climate Engagement ,  Nordea Asset Management 

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