La démographie, moteur de l’économie américaine

Publié le 5 janvier 2015 à 0h00

Béatrice Philippe

Pour faire face à la demande des primo-accédants qui arrivent en masse sur le marché, les Etats-Unis doivent augmenter de 50 % les mises en chantier de logements neufs, pour passer au moins à 1,5 million d’unités. Quand le bâtiment va…

Tiré par des taux historiquement bas et l’amélioration constante du marché du travail, l’immobilier américain a repris à un rythme modéré. Malgré des vents contraires qui ont temporairement freiné sa reprise (niveau des stocks très bas face à une demande sans précédent, entraînant une forte hausse des prix), la tendance est incontestablement positive, comme l’attestent les chiffres de vente de logements neufs et anciens depuis 2010.

La crise des subprimes, finalement, n’a fait qu’exacerber un déséquilibre démographique ponctuel

En nous basant sur l’analyse démographique, nous croyons que les crises de 2008 et 2009 ont été causées par un décalage entre l’offre et la demande de logements au moment où, pour la première fois, entre 2003 et 2007, le nombre de primo-accédants a été à son plus faible niveau pour la période, c’est-à-dire bien en deçà de l’offre de logements en construction.

Après la crise, de nombreux ménages se sont retrouvés dans une situation financière désastreuse, avec une épargne insuffisante pour financer un apport et obtenir leur prêt. Dans le même temps, les banques, confrontées à des poursuites judiciaires dues à leur implication dans les subprimes, ont durci leurs conditions. En réalité, le manque de disponibilité du crédit a été la principale raison pour laquelle la demande de prêt immobilier n’a pas augmenté plus rapidement. Peu d’acheteurs étaient en mesure de prétendre à un emprunt, compte tenu des directives strictes mises en place pour corriger les excès de la période précédente

En conséquence, au fil du temps, la proportion des 25-34 ans vivant à la maison a augmenté pour atteindre 13,9 % en 2013, contre une moyenne de 11,4 % entre 1990 et 2007.

Parallèlement, en pleine crise du logement, profitant d’un meilleur accès aux prêts étudiants, la population des jeunes adultes a poursuivi ou repris des études prolongées. Entre 2007 et 2010, le taux d’augmentation des inscriptions a été de 4,8 % par an, contre 1,5 % entre 1980 et 2007.

L’endettement étudiant paraissait pour certains être un obstacle à la reprise du logement, compte tenu du niveau de la dette étudiante, en valeur absolue, supérieure à 1 mille milliards de dollars. Pourtant, les chiffres nous disent que les ratios de remboursements mensuels comparés aux revenus sont à des niveaux plus raisonnables aujourd’hui que dans les années 1990.

Les enfants des baby-boomers veulent s’installer et tirent le marché immobilier

Maintenant que le segment des primo-accédants a atteint son plus haut niveau, et que les enfants des baby-boomers sont en âge de quitter leur famille pour fonder un foyer, l’offre de logements est actuellement inférieure au niveau nécessaire pour répondre à cette forte demande des jeunes adultes. Les mises en chantier, évaluées à environ 1 million d’unités aujourd’hui, devraient atteindre au moins 1,5 million d’unités pour répondre à une demande grandissante au cours des trois à cinq prochaines années.

Cette demande non satisfaite de logements s’est ressentie dans l’économie en général au bénéfice de nombreuses entreprises liées à la rénovation. En effet, la tendance du «do it yourself», perceptible aux premiers stades de la reprise de logement (Home Depot), s’est poursuivie avec l’augmentation des permis de construire liés à des développements immobiliers d’habitations (Howard Hughes), entraînant dans leur sillage les matériaux industriels nécessaires à la construction résidentielle comme les pompes, les vannes, les produits électriques et les technologies de filtration (Pentair, Hubbell, RPM International).

La croissance américaine pourrait surprendre à la hausse

L’économie se renforce, tirée par un emploi fort, la hausse de la productivité grâce à une main-d’œuvre qualifiée et l’augmentation de la richesse nette des ménages américains. De surcroît, l’énergie à faible coût bénéficie aux industries américaines, mais aussi aux ménages, ce qui impacte positivement la consommation et tire l’économie. La dynamique en matière de logement continuera de contribuer activement aux perspectives de croissance aux Etats-Unis.

Béatrice Philippe

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