L’engagement actionnarial pour la durabilité des océans

Publié le 31 décembre 2020 à 17h40

Gilles Dard

L’état des océans se détériore. Une économie bleue durable n’est pas seulement indispensable pour la planète, mais aussi d’un point de vue économique. Un engagement actif des investisseurs pourrait contribuer à inverser la tendance.

La valeur économique des actifs des océans du globe s’élève à 24 000 milliards de dollars, ce qui en fait la septième plus grande économie. Avec l’accélération du changement climatique, la pollution plastique et la surpêche, leur état se détériore.

Plus d’un tiers des grands investisseurs institutionnels considèrent aujourd’hui l’économie bleue comme l’un des thèmes de placement durable les plus importants, mais elle reste l’un des domaines qui profitent le moins des placements à impact, en raison du manque de solutions disponibles. Un nombre croissant d’investisseurs privés et institutionnels souhaitent soutenir les entreprises déjà très soucieuses de la santé des milieux marins.

On observe par ailleurs que les actionnaires tirent de plus en plus parti de leur influence pour exercer un impact positif sur les activités et le comportement des entreprises, en leur demandant de rendre compte du respect des normes ESG. Ce concept d’«engagement» est l’une des stratégies d’investissement responsable qui connaissent la plus forte croissance dans le monde. Dans le contexte de l’économie bleue, les domaines offrant des opportunités d’investissement «engagé» se trouvent notamment dans l’atténuation et l’adaptation au changement climatique, les énergies maritimes renouvelables, la prévention de la pollution plastique, ainsi que la pêche et l’aquaculture durables. En 2011, 20 investisseurs – tous signataires des Principes pour l’investissement responsable de l’ONU – ont engagé un dialogue avec 40 entreprises internationales de la chaîne de valeur des produits de la mer, se renseignant sur leurs pratiques d’approvisionnement responsable.

En 2016, les investisseurs de la chaîne de supermarchés britannique Tesco ont demandé à l’enseigne de ne vendre que du poisson et des fruits de mer certifiés durables par le Marine Stewardship Council. Tesco, qui est le plus grand vendeur de poisson du Royaume-Uni, poursuit désormais une politique d’approvisionnement visant à ce que l’intégralité de ses produits de la mer provienne de sources durables certifiées, et participe à des initiatives du secteur promouvant la transparence, comme l’Ocean Disclosure Project.

Comme l’illustre cet exemple, l’engagement des actionnaires est le moyen le plus direct d’avoir un impact dans le segment des actions cotées. Influencer le comportement des entreprises par une approche proactive peut créer un cercle vertueux ayant des résultats positifs sur le plan social, environnemental et financier, tout en réduisant les risques encourus à la fois par nos océans et par les entreprises. En outre, une telle démarche peut générer des rendements et réduire les risques des investisseurs.

S’il existe relativement peu d’études sur l’impact financier de l’implication des actionnaires, toutes celles qui ont été réalisées démontrent qu’un engagement efficace se traduit par des résultats financiers positifs. L’engagement des investisseurs peut en effet influencer la performance d’une entreprise de quatre manières : en améliorant le positionnement concurrentiel via l’adoption de modèles commerciaux plus durables permettant d’attirer les consommateurs ; en réduisant les risques de réputation grâce à une meilleure gouvernance conduisant à la mise en œuvre de pratiques de lutte contre le blanchiment d’argent et à limiter les grèves, les manifestations ou les boycotts ; en anticipant les risques réglementaires et en évitant les taxes sur les activités polluantes par le biais d’infrastructures et d’équipements innovants ; en améliorant les notations/classements ESG via la publication d’informations concernant les enjeux ESG.

Des océans sains et abondants sont essentiels à la survie de chacun et à la prospérité économique mondiale. La durabilité s’inscrivant en tête des priorités des consommateurs, des investisseurs et des entreprises, l’attention portée à la réduction du fardeau pesant sur les milieux marins s’est accrue. Les investisseurs qui s’engagent en faveur de l’objectif de développement durable n° 14 (vie aquatique) peuvent réduire les risques encourus par les océans et les entreprises, renforcer la compétitivité de ces dernières et améliorer la santé des milieux marins en vue de la croissance future.

L’économie bleue deviendra certainement un thème d’investissement de plus en plus important dans les années à venir. 

Mots clés Banque
Gilles Dard

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