Peut-on investir dans les actions émergentes en 2023 ?
Les premières estimations de 2023 semblent indiquer que les marchés émergents pourraient résister au ralentissement de la croissance et permettre un fléchissement de l’inflation, et ce, malgré la fin de la politique zéro covid en Chine et la dépréciation du dollar américain. Cela pourrait ouvrir la voie à une reprise économique en 2024.
Il existe au moins trois raisons de penser que la croissance économique des marchés émergents ralentira en 2023. Tout d’abord, la récession attendue aux Etats-Unis puis en zone euro, qui entraînera sans doute une diminution de la demande mondiale de biens. Cela constituera une menace particulière pour les petites économies ouvertes d’Asie, d’Europe centrale et orientale et du Mexique, dont la croissance repose sur les exportations.
Ensuite, si la réouverture de l’économie chinoise peut soutenir la demande de ressources naturelles, un ralentissement de la croissance mondiale devrait peser sur les prix des produits de base. Cela laisse entendre qu’il est peu probable que les pays émergents qui en exportent puissent bénéficier des avantages commerciaux généralement nécessaires pour stimuler leur croissance.
Enfin, le durcissement des politiques économiques locales pèsera de plus en plus sur la croissance. Les gouvernements cherchent à réparer les dégâts causés aux finances publiques par la pandémie de Covid-19, et les effets retardés des fortes hausses de taux d’intérêt antérieures auront également un impact sur la demande. La dégradation des balances de paiement implique que les taux devraient encore augmenter dans certaines parties de l’Asie et des pays d’Europe centrale et orientale si les conditions financières internationales continuent de se resserrer.
Toutefois, l’inflation dans les pays émergents semble proche de son pic et devrait commencer à refluer au cours de l’année 2023. Les fortes hausses des prix des produits primaires induites par l’invasion de l’Ukraine par la Russie au début de 2022 devraient ralentir, les effets de base de l’inflation des produits alimentaires et énergétiques devenant plus favorables. La combinaison de politiques plus strictes et d’une croissance plus lente finira par peser sur les tensions de fond. Le ralentissement de l’inflation allégera la pression sur les revenus réels et permettra sans doute à certaines banques centrales, notamment en Amérique latine, de commencer à baisser à nouveau leurs taux d’intérêt au second semestre, ce qui devrait favoriser une reprise cyclique à l’approche de 2024.
En parallèle, il existe quatre soutiens potentiels pour les marchés d’actions émergents en 2023 : la fin de la politique zéro covid en Chine, la désinflation mondiale, la stabilisation ou la dépréciation du dollar américain et les valorisations qui reflètent désormais une faible dynamique bénéficiaire à court terme. Il est possible que la Chine connaisse une reprise cyclique. Son économie a connu des difficultés du fait de la politique zéro covid et des tensions dans le secteur de l’immobilier. Elle semble maintenant passer à une approche endémique de la gestion du virus. Les nouveaux vaccins fournis par le pays favorisent une nouvelle avancée de la vaccination. La transition vers un état endémique entraînera certainement des sorties de capitaux, mais réduira considérablement le risque d’une pression macroéconomique persistante.
Le resserrement antérieur du secteur de l’immobilier, conjugué à une restriction réglementaire de l’effet de levier (dette) des promoteurs, a conduit à une crise de confiance et à un ralentissement marqué des ventes en 2022. La situation est compliquée, mais les mesures de soutien politique se multiplient.
Avec la désinflation et donc l’amélioration des taux d’intérêt réels, les monnaies des pays émergents, globalement bon marché aujourd’hui, devraient se redresser. Le taux de change effectif réel (TCER) du dollar américain est un facteur de soutien aux devises émergentes qui pourrait leur permettre de se redresser, atténuant ainsi la pression sur les banques centrales et les conditions financières des pays émergents. Alors que les perspectives de croissance mondiale pour 2023 sont faibles et que des interrogations subsistent quant à l’inflation et aux taux d’intérêt, les valorisations reflètent quant à elles des perspectives bénéficiaires encore plus pessimistes. L’incertitude et les pressions sur les bénéfices à court terme pourraient présenter des opportunités d’investissement, car globalement les actions semblent faiblement valorisées et une reprise des devises des marchés émergents améliorerait les rendements pour les investisseurs en dollars américains.
En résumé, les mois à venir pourraient offrir de nombreuses opportunités pour les investisseurs cherchant à accroître leur exposition sur les actions des pays émergents. Si un certain nombre de risques et d’incertitudes subsistent, dont les tensions géopolitiques entre les Etats-Unis et la Chine, les marchés sont tournés vers l’avenir. Les valorisations se sont améliorées, les prévisions de bénéfices ont été révisées et les devises sont globalement bon marché. L’année 2023 pourrait marquer un pic dans le cycle monétaire et l’année 2024 pourrait apporter de meilleures conditions économiques.
Un besoin en investissements de 130 000 milliards USD
Les investisseurs soulignent de plus en plus les caractéristiques attrayantes des actifs réels, dans le climat économique actuel. Animées par des besoins essentiels – comme le logement, l’électricité, les transports et les communications – les activités relatives à ces actifs sont souvent monopolistiques, présentant des rendements contractés ou réglementés, qui fournissent une solide assise de stabilité en période de stress économique. En outre, la grande majorité des actifs réels ont la capacité de répercuter les hausses de prix – c'est pourquoi ce segment a historiquement surpassé les actifs boursiers traditionnels pendant les périodes d'inflation.
Le besoin en investissements pour que les infrastructures et les actifs immobiliers existants puissent répondre aux enjeux sociétaux devrait atteindre 130 000 milliards USD au cours des trois prochaines décennies. A titre d’exemples, cet univers regorge d’entreprises convaincantes en matière de gestion environnementale, sociale, ou bien positionnées pour participer à la transition énergétique. C’est notamment le cas de National Grid, propriétaire de réseaux de transmission d'électricité au Royaume-Uni, à la pointe de la gestion environnementale. Entre 2022 et 2026, National Grid a prévu un plan d'investissement de 30 à 35 milliards de livres sterling pour répondre aux objectifs « net zero » du Royaume-Uni.
Autre exemple, le groupe portugais de services publics électriques EDP, efficace dans l'innovation au profit de la décarbonisation. Il s’agit d’un des plus grands développeurs d'énergie renouvelable au monde, générant 24,7GW, qui dessert neuf millions de clients. EDP a actuellement un objectif de capacité d'hydrogène de 1,75GW d'ici 2030, alors qu'il maintient son objectif d'abandonner toute la production de charbon d'ici 2025, pour fonctionner avec une capacité renouvelable de 100% d'ici la fin de la décennie.
Enfin, dans le domaine social, l’entreprise américaine Ventas qui opère dans l’immobilier de santé compte 1 200 établissements aux États-Unis, au Canada et au Royaume-Uni. Ventas est en mesure d’apporter des réponses aux besoins croissants en capacités de soins de santé, à l’enjeu du développement de centres médicaux, mais aussi à celui du développement de logements adaptés au vieillissement de la population. Notons que la population âgée des Etats-Unis connaît une croissance significative, face à laquelle l’offre globale de logements pour seniors a chuté de 66% dans le pays depuis 2017 ! En somme, les planètes semblent bel et bien alignées pour que les actifs réels s’imposent structurellement au cœur des portefeuilles diversifiés des investisseurs.