Private Equity et création de valeur : mythe ou réalité ?

Publié le 24 septembre 2025 à 10h00

Florian Jérome    Temps de lecture 3 minutes

Le private Equity est souvent accusé de ne créer de la valeur qu’à travers la financiarisation : effet de levier, dette accrue, profiter de la croissance des multiples de valorisation… Avec en toile de fond le spectre d’une « bulle ». Cette lecture réductrice oublie pourtant l’essentiel : dans la plupart des transactions, la croissance du chiffre d’affaires et de l’EBITDA reste le principal moteur de performance. Dans un contexte de multiples en baisse et de taux en hausse, le plan de création de valeur devient encore plus décisif. Aujourd’hui, l’attention se porte donc sur les leviers opérationnels de création de valeur.

Quand les chiffres contredisent les clichés

Selon Gain.pro, 83 % de la création de valeur en 2024 provient d’améliorations opérationnelles, dont 71 % grâce à la croissance du chiffre d’affaires et 12 % via l’amélioration des marges.

À l’inverse, seuls 17 % relèvent de l’expansion des multiples. Le consensus de marché converge vers une répartition proche : environ 70 % de la valeur issue de la croissance, 15 % de l’effet de levier et 15 % de l’évolution des multiples.

Ces chiffres rappellent que la financiarisation n’explique qu’une minorité des performances. L’enjeu est donc de comprendre sur quels leviers opérationnels s’appuient réellement les fonds.

Trois leviers désormais incontournables

  • 1. La croissance organique reste le premier moteur. Elle ne se limite pas à l’internationalisation : stratégies de go-to-market, politique de pricing, optimisation du mix produit ou encore digitalisation sont autant de leviers activés par les fonds.
  • 2. La croissance externe (Build-ups/Add-ons), ensuite, s’impose comme un pilier structurant. McKinsey estime qu’elle représente désormais près de 40 % de la création de valeur des LBO.
  • 3. Enfin, l’amélioration des marges, parfois négligée ces dernières années, revient au centre des priorités, à condition d’être cohérente avec le modèle économique et de ne pas se réduire à une simple rationalisation des coûts à court terme.

La création de valeur ne se réduit pas à l’existence de ces leviers, mais se joue dans la façon dont ils sont combinés et mis en œuvre.

Comprendre le « playbook »/ la stratégie des gérants

Chaque fonds possède son expertise propre, mais les plus performants savent combiner de manière cohérente les trois leviers clés de création de valeur. Pour l’investisseur, il s’agit de comprendre cette mécanique : l’analyse des cas passés, l’examen des rapports de performance et l’observation du rôle croissant des équipes opérationnelles offrent des indicateurs précieux. Selon McKinsey, les effectifs d’Operating Partners ont doublé en trois ans, illustrant l’importance désormais accordée à la valeur ajoutée opérationnelle pour créer de l’alpha.

Identifier la valeur réelle

Évaluer une stratégie de Private Equity consiste donc à identifier les leviers réellement mobilisés – croissance organique, build-ups, discipline de marge – et à en comprendre la logique sous-jacente. Cette lecture doit être confrontée aux faits : trajectoire historique des sociétés de gestion, réalisations passées et capacité à reproduire dans le temps une performance durable, au-delà des simples effets de levier ou d’évolution des multiples.

La création de valeur en Private Equity n’est pas un mythe : l’essentiel provient de la croissance opérationnelle, qu’elle soit organique, externe ou liée à la discipline de marge. La véritable question est désormais de savoir quels modèles permettront de maintenir cette dynamique dans un environnement de taux durablement élevés et de valorisations sous pression.

Florian Jérome private assets partnerships & fund selection lead ,  AirFund

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