Bilan gestion d'actifs

Assurance-vie : que faire face à la baisse des rendements des fonds en euros ?

Publié le 6 mai 2016 à 16h58    Mis à jour le 27 juillet 2021 à 10h56

Franck Pauly

Face au recul des rendements des fonds en euros, qui est appelé à se poursuivre, les investisseurs doivent se tourner vers d’autres supports comme les unités de compte. Mais sortir d’un produit garanti est psychologiquement difficile. Surtout quand la bourse fait du yo-yo.

Les taux d’intérêt sur les obligations d’Etat, qui constituent l’essentiel de l’investissement des fonds en euros, sont à leurs plus bas à cause des politiques accommodantes des banques centrales. Logiquement, depuis plusieurs années, les rendements servis par les fonds en euros ne cessent donc de baisser. La Banque de France et les autorités prudentielles ont d’ailleurs mis en garde les assureurs face à une perspective de remontée des taux (lire encadré), qui ferait baisser les cours des anciennes obligations et les mettrait en difficulté. Les assureurs encouragent leurs clients à diversifier leurs investissements pour aller vers des produits misant sur la bourse ou sur l’immobilier. Ils y ont eux-mêmes intérêt car cela leur «coûte» moins cher en termes de fonds propres et de provisions.

Car si le taux moyen des fonds en euros atteignait 5,45 % en 1995, il est revenu à 2,2 % l’an dernier, après 2,5 % en 2014. Et pourrait tomber à 2 % cette année. Face à cette tendance qui ne semble pas près de s’arrêter, que faire ? Outre les unités de compte, qui montent indéniablement en puissance – elles représentent aujourd’hui environ 20 % de la collecte –, il existe quelques alternatives attrayantes aux classiques fonds en euros.

Une règle d’or de la gestion patrimoniale s’applique pourtant bien à l’assurance-vie : il faut diversifier son épargne pour assurer son avenir. Outre les assureurs et les banques, les sociétés de gestion et les associations d’épargnants comme les conseillers encouragent les épargnants à diversifier leurs placements en se tournant en partie vers les unités de compte, c’est-à-dire des placements cotés en bourse comme les actions et les obligations, mais aussi quelquefois vers l’immobilier. Ces professionnels encouragent d’ailleurs à utiliser le transfert «Fourgous» d’un contrat monosupport en euros vers un contrat multisupport incluant des UC, sans perte d’antériorité fiscale dans le contrat.

La plupart proposent, à côté d’une gestion libre à l’entière liberté de l’épargnant, des gestions profilées, faisant varier la part de l’investissement en fonds en euros en fonction de la performance visée et du risque que l’investisseur est prêt à accepter. En général, un profil sécuritaire compte au minimum 80 % investis en fonds en euros et 20 % en UC. Un profil modéré sera réparti sur une base de 50/50. Enfin, un profil dynamique n’aura que 20 % investis en fonds en euros et 80 % en UC.

L’attrait de l’assurance-vie, avec une collecte nette de 24,6 milliards d’euros l’an dernier selon l’Association française de l’assurance – sa meilleure depuis 2010 – ne se dément pas. Et l’encours, qui dépasse les 1 600 milliards d’euros, en fait le placement préféré des Français. Selon la dernière enquête de la Banque de France, elle représente 37,7 % de l’épargne, 31,4 % étant en fonds en euros et 6,3 % en unités de compte.

Mais le poids des UC progresse régulièrement et représente actuellement 20 % des versements, les cotisations mensuelles variant entre 1,4 et 2,8 milliards par mois depuis 2014. Avec des plus bas de 1,4 milliard en février 2014, août 2014 et novembre 2014 et des plus hauts, correspondant souvent à des périodes boursières fastes, de 2,8 milliards en mars 2015 et de 2,6 milliards en avril et décembre 2015. Les chiffres sont quelquefois plus élevés suivant les établissements : chez BNP Paribas Cardif, la part des UC et des fonds euro-croissance a représenté 40 % du chiffre d’affaires en 2015 (34 % en 2014).

De nouveaux fonds euros boostés

Une des raisons de cet engouement persistant pour les fonds en euros réside dans l’attrait des nouveaux produits dynamisés grâce à divers investissements en dehors des obligations d’Etat.

Ceux à dominante immobilière continuent de tenir le haut du pavé, car la pierre rapporte encore 4 % à 5 %, voire 6 % suivant le type de placement : des rendements bien supérieurs aux 0,6 % des obligations d’Etat françaises à 10 ans… Et l’an dernier, c’est encore Sérénipierre de Primonial qui est arrivé en tête des meilleurs fonds euros – toutes catégories confondues – avec un rendement de 4 %. Il avait rapporté 4,05 % en 2014 et 4,15 % en 2013. La raison ? Ce contrat est investi en immobilier à 80 %, quand la plupart des autres, qui rapportent autour de 3 % pour les meilleurs, ne le sont qu’à 30 %.

Les fonds euro-dynamiques placent quant à eux une partie de leur portefeuille en actions, habituellement 20 % à 25 %, pour doper leur performance. Cela tire le rendement vers le haut, mais implique aussi un risque accru. Toujours est-il que le meilleur fonds de cette catégorie, NéoEuro Garanti distribué par UAF Life Patrimoine, a rapporté l’an dernier 3,6 %.

Quant aux nouveaux fonds euro-croissance, lancés fin 2014, ils ont du mal à décoller. Et restent rares. Accessibles sans conditions, ils ne garantissent le capital investi qu’à la huitième année. Toute sortie avant cette échéance peut donc déboucher sur une perte, mais les épargnants peuvent espérer à long terme des rendements légèrement supérieurs à ceux des fonds euros classiques. Car les portefeuilles sont répartis en deux parts. La plus importante est investie sur des placements sécuritaires assurant la garantie du capital à terme. L’autre, destinée à doper la performance, est placée en bourse. Pour l’assureur, le produit, moins gourmand en fonds propres qu’un fonds en euros classique, est intéressant. Mais pour l’épargnant, le peu de fonds offerts pour le moment, notamment par AFER, AGIPI, Crédit Agricole, Generali ou BNP Paribas, et l’historique court de ces fonds euros ne permettent pas vraiment de tirer de conclusion.

Au-delà de ces nouveaux fonds, les contrats proposés sur Internet par les courtiers et les banques en ligne ne comportent pas de frais d’entrée et offrent des fonds euros dont le rendement final est souvent supérieur à la moyenne en l’absence de ces coûts.

Attention, les meilleurs produits, les fonds immobiliers et les rares fonds dits opportunistes, laissant «carte blanche» au gérant, imposent souvent des restrictions de souscriptions. Ils ne sont donc pas totalement librement accessibles. Car seulement les nouveaux versements – par opposition aux arbitrages entre différents supports au sein d’un contrat multisupport – peuvent y être affectés. On ne peut y investir que 20 % ou 30 % dans la plupart des cas, le solde devant être affecté à des UC ou à un autre fonds en euros classique.

Quel type de fonds retenir ?

Au-delà des nouvelles générations de fonds en euros, quel type de placement peut-on retenir pour mettre dans son contrat d’assurance-vie ? Le problème : aucun autre placement n’apporte la sécurité (capital garanti à 100 %), alors que les taux des livrets bancaires – y compris le Livret A ou le Livret de développement durable défiscalisés – sont tombés aujourd’hui à des taux très faibles de 0,75 %. Il faut donc composer avec des placements faisant certes miroiter des rendements supérieurs à ceux des fonds en euros, classiques ou non... mais s’accompagnant d’une prise de risque en proportion. Cette tendance devrait se poursuivre.

Les fonds dits «patrimoniaux», des fonds flexibles prudents, qui arbitrent et modifient la répartition du portefeuille en actions et en obligations notamment, sont souvent recommandés pour miser sur la bourse sans trop de risque. Sur une échelle maximale de risque allant à 7, ces OPCVM se situent autour de 3 ou 4.

Les plus emblématiques de cette catégorie, que l’on trouve souvent chez les conseillers et sur les plateformes, sont notamment Amundi Patrimoine, Carmignac Patrimoine, Eurose de chez DNCA, M&G Optimal Income ou JP Morgan Global Income. Ils visent pour la plupart des rendements annuels de 5 % à 6 %. Mais ces fonds investissant jusqu’à 50 % de leur portefeuille en actions comportent un risque : seuls les meilleurs atteignent leur objectif.

Autre piste envisageable : les fonds thématiques investissant sur les grandes tendances porteuses mondiales et destinées à perdurer telles que le vieillissement de la population et leurs implications en matière de consommation ou de santé, sur l’accès à l’eau, le changement climatique ou l’intelligence artificielle. Ces produits ont le vent en poupe, mais doivent se méfier des effets de mode. Ils sont toutefois souvent investis sur des grandes valeurs qui misent sur le long terme, ce qui limite les risques.

L’investisseur peut aussi se tourner vers les produits spécialisés sur l’immobilier comme les Sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) qui rapportent environ 5 % par an. Ou bien les Organismes de placement collectif (OPCI), plus diversifiés et plus récents que les SCPI, mais qui rapportent un peu moins.Ces types de placements sont souvent mis en avant par les CGPI à cause de la relative sécurité apportée par la pierre.

Les autorités mettent en garde les assureurs-vie

Après les déclarations à l’automne 2014 du gouverneur de la Banque de France, le Haut Conseil de stabilité financière, autorité chargée de la surveillance du système financier, vient à son tour de rendre publiques ses craintes concernant les rendements des fonds euros.

Ces autorités demandent une baisse des rendements, jugeant l’ajustement à la baisse des rémunérations insuffisant car les taux d’intérêt sont très bas. Elles soulignent la nécessité d’adapter ces rendements à l’environnement financier actuel. Car en servant aujourd’hui des rendements compris entre 2 % et 3 %, les compagnies doivent en partie puiser dans l’argent qu’elles ont mis de côté dans la PPE (provision pour participation aux excédents) afin de doper le rendement.

Surtout, alors que la Fed américaine a déjà entamé le mouvement, une remontée trop brutale des taux d’intérêt – un scénario qui n’est toutefois pas privilégié – entraînerait un krach obligataire. Ce qui conduirait les compagnies d’assurance à devoir vendre une partie de leurs obligations dans de très mauvaises conditions.

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