Marché

La fintech, amie ou adversaire du CGPI ?

Publié le 5 mai 2017 à 18h49    Mis à jour le 27 juillet 2021 à 10h53

Emmanuel Schafroth

La «fintech» est dans l’air du temps. Derrière ce mot-valise se cache une foule variée de start-ups, dont certaines louchent clairement du côté de l’épargne des Français. Reste à savoir si les CGPI ne doivent voir là qu’une concurrence nouvelle ou, au contraire, de nouveaux partenaires potentiels.

Des entreprises financières utilisant les nouvelles technologies de l’information pour accéder au marché ? A vrai dire, la logique qui se cache derrière la «fintech» n’est pas aussi récente que ce joli mot-valise lui-même. Pour le dire autrement, cela fait près de 20 ans que le site Boursorama a été lancé ! La différence, évidemment, c’est qu’aujourd’hui, tout le monde a un accès à Internet dans sa poche, via son smartphone.

Pour autant, «uberiser» les banquiers privés ou les CGPI est-il si facile ? Clairement, c’est l’ambition affichée par la poignée de robo-advisors qui se sont lancés sur le marché français. Des sociétés comme Advize ou Anatec (qui propose l’offre WeSave) œuvrent d’ailleurs sous le double statut de CIF et de courtier en assurance, tandis que Yomoni s’est d’emblée orienté vers le statut de société de gestion de portefeuille, pour répondre à des ambitions importantes. Pour l’heure, les chiffres restent modestes mais progressent vite : les encours de Yomoni ont quasiment doublé sur le seul dernier trimestre 2016, passant de 6 à 11,7 millions d’euros et la société affiche un objectif d’un milliard d’euros d’actifs sous gestion à l’horizon 2020.

L’offre de ces robo-advisors peut prendre la forme d’un véritable mandat de gestion (c’est le cas de Yomoni) ou d’une gestion conseillée (Advize) et se fonde sur un modèle d’allocation et des outils de gestion passifs (ETF) pour optimiser les coûts. La prochaine crise financière sera sans doute le juge de paix de ces nouvelles pousses mais, pour l’instant, il faut avouer que les performances sont globalement au rendez-vous. Pour sa première année d’activité, achevée le 19 février dernier, WeSave, qui propose 10 profils de risque, a annoncé des performances nettes de frais étagées entre 1,46 % pour le plus prudent et 16,32 % pour le plus agressif, soulignant d’ailleurs que ce dernier affiche une volatilité de 9 % seulement, soit deux fois moins que le CAC 40 pour une performance légèrement supérieure. Quant à une offre comme Yomoni Kids (contrat d’assurance vie pour leurs enfants), elle démontre que l’automatisation apportée par les «robots» ne concerne pas seulement la gestion proprement dite, mais aussi la simplification du parcours clients, avec à la clé une différenciation de l’offre.

Très clairement, les robo-advisors sont pris au sérieux comme nouveau canal de distribution par les gestionnaires d’actifs, qui vont jusqu’à financer leur développement. On trouve ainsi Amundi au capital de WeSave et la Financière de l’Echiquier (via sa structure d’incubation Iéna Ventures) finance Yomoni, société par ailleurs présidée par son ancien directeur des opérations Sébastien d’Ornano.

Et si les robo-advisors n’étaient pas seulement un nouveau canal de distribution mais aussi un outil d’acquisition clients potentiel pour les CGPI ? L’initiative «Link by Primonial» est à ce titre intéressante. Cette plateforme d’épargne en ligne est construite sur un modèle «B-to-B-to-C», le client final étant parrainé par un conseiller financier, qu’il soit salarié du groupe Primonial ou indépendant, et se voyant proposer une offre d’investissement fondée sur un modèle d’allocation de Lyxor. Il y a clairement là un moyen pour les CGPI de démarrer une relation commerciale avec une clientèle plus jeune, moins aisée (le minimum d’investissement est de 1 000 euros) et moins sophistiquée, qu’ils ne pouvaient pas adresser jusqu’ici, faute de temps à lui consacrer.

Mais la fintech ne se limite pas aux robo-advisors. L’univers du financement participatif est aussi un nouveau champ de l’épargne, et notamment le «crowdlending» qui, via des plateformes comme Lendix ou Crédit.fr, offre un accès direct à une nouvelle classe d’actifs. Ces prêts aux PME/ETI, désormais accessibles à tous, ne sont évidemment pas exempts de risques, comme le montrent les taux de défaut significatifs de certaines plateformes, mais ont de quoi séduire par leur prise directe sur l’économie réelle et leur profil de rendement régulier. Là encore, si le numérique permet une totale désintermédiation, les CGPI peuvent se saisir du sujet. C’est ainsi que Louis Alexandre de Froissard, gérant de Montaigne Conseil, propose d’ores et déjà à ses clients un mandat de gestion pour investir dans les prêts à des projets d’énergies renouvelables proposés par différentes plateformes, dont Lendosphere, quand les fonds du secteur ne sont souvent accessibles qu’à une clientèle institutionnelle. 

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