Digitalisation de la relation partenaires : une évolution naturelle pour consolider la pluralité des acteurs

Publié le 23 novembre 2023 à 10h41

Pascal Koenig

L’année 2023 n’aura pas dérogé à la règle, pour les conseillers en gestion de patrimoine. Elle aura, en effet, confirmé les tendances de fond qui transforment radicalement la vie des cabinets depuis quelques temps : à une pression réglementaire croissante et confusante (RIS, préférence durable…) continue de s’ajouter des besoins clients en constante évolution (extension de la finance durable, essor du private-equity, montée en puissance de l’épargne retraite…) et un contexte économique et financier désarçonnant.

La concomitance de ces enjeux accentue, comme jamais, la complexité du métier de CGP au quotidien. Elle explique aussi pour partie l’accélération des rapprochements de cabinets, qu’ils soient sponsorisés par des fonds ou par des industriels du secteur. Le risque de cette course à la consolidation ? Que l’écart se creuse un peu plus entre les cabinets indépendants (40% des cabinets sont des structures unipersonnelles et 90% ont moins de 5 salariés*), géographiquement éloignés (70% des cabinets sont implantés en régions hors Ile-de-France*) de leurs partenaires fournisseurs de solution d’épargne et leurs confrères de taille importante ou fraichement regroupés, au centre de toutes les attentions des producteurs de produits financiers.

Les cabinets ne sont, certes, pas seuls. Les chambres jouent un rôle central, tandis que les plateformes spécialisées organisent des rencontres au plus près du terrain. Enfin, plusieurs bases de données professionnelles permettent aux conseillers de se repérer dans le maquis des offres disponibles. Mais, est-ce suffisant ? Prendre une décision d’allocation ou d’investissement dans un fonds est un cheminement complexe qui exige une analyse poussée, une solide dose de conviction et de rapidité d’exécution et dépasse la seule vision quantitative. Qualité des produits, expertise et réactivité des équipes commerciales, notoriété de la marque ou connaissance des dernières innovations sont autant de critères qui nécessitent un dialogue nourri et fréquent avec les fournisseurs de solutions d’épargne. Mais comment instaurer cette nécessaire proximité, quand l’offre disponible est pléthorique (plus de 33 000 UCITS **) et que le maintien d’une force commerciale capable d’interagir efficacement avec les cabinets à actifs confiés relativement moyens et limités est hors de portée de la grande majorité des sociétés de gestion ?

Le risque ici est d’instaurer un marché à deux vitesses. Un tiers des conseillers travaillent d’ailleurs déjà avec moins de 10 sociétés de gestion (***). Et cette proportion est d’autant plus faible que les cabinets sont de structure unipersonnelle (***). De quoi affecter leur proposition de valeur, qui se fonde sur des allocations en architecture ouverte et une grande autonomie dans leur sélection. Si le débat s’est focalisé, jusqu’à présent, sur le modèle de rémunération, la préservation d’un maillage du territoire et d’un haut niveau qualitatif de prestation reposent également sur une juste accessibilité à l’information.

Que faire, dans ces conditions ? Comme dans toute industrie, instiller de la technologie.  De nombreuses innovations ne cessent de fluidifier le workflow des conseillers. Sont aussi bien concernés, la compliance que la souscription, les outils de reporting et la relations client. L’objectif est, désormais, de faire pleinement profiter des potentialités du digital au dernier maillon encore sous-équipé de ce workflow : celui des interactions avec les partenaires. De nombreuses dimensions de cette relation peuvent en effet être systématisées : cartographie et analyse des offres et des acteurs, juste compréhension des objectifs d’investissements du véhicule, adéquation de la solution aux attentes du client, interactivité et proximité avec les équipes commerciales des fournisseurs, veille sur les derniers innovations, formation sur les nouveaux types d’instruments… Il en va de la vitalité de la profession. Il en va surtout de l’intérêt-même de la gestion conseillée des clients finaux.

 

(*) Source Apredia : livre blanc 2023

(**) Source Efama Fact Book 2023

(***) Source Insight AM 2022

Pascal Koenig Associé et Fondateur ,  Patrimeta

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