(AOF) - Alexis Bienvenu, fund manager chez La Financière de l'Echiquier (LFDE), s’est penché sur la volonté de dérégulation de la finance par Donald Trump. Même si le président élu n’a jusqu’ici rien énoncé de précis à ce propos, le gérant note que le marché s’attend à voir les contraintes prudentielles pesant sur les banques s’alléger, ou à tout le moins ne pas s’alourdir, comme cela aurait dû être le cas s’il avait été décidé d’appliquer aux Etats-Unis l’accord dit "Bâle 3" visant à renforcer la réglementation bancaire.
Alexis Bienvenu évoque la possibilité de la suppression d'une "partie de la réglementation mise en place dans le sillage de la crise financière de 2008, rassemblée dans la loi Dodd-Franck adoptée en 2010 sous la présidence Obama". Il rappelle que cette loi, qui avait notamment contraint les banques à constituer davantage de réserves pour parer aux crises et à modérer les risques pris sur les marchés, avait été en partie assouplie lors du premier mandat de Donald Trump.
"Si les banques elles-mêmes, du moins leurs actionnaires, ne peuvent que se réjouir de l'espoir d'un nouvel assouplissement, l'économie américaine – et par extension mondiale, tant il est vrai que la planète financière est étroitement imbriquée – s'en portera-t-elle réellement mieux ?" s'interroge le gérant.
Ce dernier juge possible qu'à court terme la production de crédit et l'investissement dans l'économie soient favorisés. Même si – souligne-t-il, l'économie américaine – sauf peut-être dans le secteur de l'immobilier commercial et des infrastructures - n'a guère besoin aujourd'hui d'un nouveau stimulus.
"Mais surtout, à long terme, la destruction des pares-feux mis en place par Dodd-Franck risque de rendre l'économie plus vulnérable", prévient Alexis Bienvenu. Ce dernier rappelle que lors de la crise des banques régionales aux Etats-Unis, quelques banques de petite ou moyenne taille avaient vu leur solidité menacée en raison de la hausse des taux début 2023 après avoir vu certaines contraintes allégées par la réforme trumpienne de 2018.
"Trump a-t-il tiré la leçon de cette crise dont, par sa réforme de 2018, il fut indirectement le facilitateur ? À l'heure où il ne jure que par la dérèglementation, on peut en douter", soutient le gestionnaire d'actifs. Mais pire encore pour ce dernier, la réticence à l'encadrement du risque bancaire pourrait se propager à l'Europe. Car selon le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau, l'Europe pourrait être tentée de repousser l'implémentation des derniers volets de la réglementation dite "Bâle 3" afin de ne pas souffrir excessivement de la concurrence exercée par la finance américaine allégée de nombreux garde-fous.