(AOF) - "Nous sommes axés sur la transition énergétique" C’est ce qu’affirme Jonathan Aiach, directeur France de CapMan, gérant d’actifs finlandais coté à la Bourse d’Helsinki. Dans un entretien accordé à AOF, il détaille sa stratégie d’investissement qui touche les domaines de l’énergie, de l’immobilier, des infrastructures et des forêts, essentiellement dans la zone nordique.
Vous représentez en France le fonds finlandais Capman qui vise le non-coté…
Notre stratégie vise uniquement les marchés privés. Capman a été fondée en 1989 avec une stratégie axée sur le private equity et le buyout. Nous gérons aujourd'hui 6 milliards d'euros dont un peu plus de 5 milliards dans l'immobilier, les infrastructures et les énergies vertes. Nous avons par ailleurs acquis en janvier une société de gestion spécialiste de la forêt.
Votre stratégie vise les valeurs du nord de l'Europe...
Nous investissons principalement en Scandinavie et aux Pays-Bas. Les infrastructures incluent les transports, l'énergie, les réseaux de chauffage, nous sommes donc axés sur la transition énergétique. Nous avions précédemment une société de ferrys en Norvège et nous avons engagé l'électrification de sa flotte avant de la revendre. Elle a également lancé le premier ferry à hydrogène. Les ferries sont aussi nécessaires en Norvège que les autobus chez nous, et sont donc des acteurs importants au niveau local.
Vous êtes aussi actifs dans les énergies renouvelables…
Nous avons des projets dans le solaire, notre fonds infrastructures a développé des panneaux solaires en Finlande - ce qui peut paraître contre-intuitif au vu de la situation géographique du pays. Cependant il est comparable à celui de la côte Nord de l'Allemagne. Le solaire assure actuellement 0,3% de la production d'énergie en Finlande contre 10% en Allemagne. Il y a donc une marge de rattrapage évidente.
Ces pays sont plus connus pour leur recours à la géothermie…
C'est vrai. Nous avons très récemment annonce notre investissement dans un réseau de chauffage géothermique au sud de la Finlande, avec des sources chaudes qui a travers le réseau permettent de satisfaire les besoins de la ville de Hamina (20 000 habitants). Nous avons un accès privilégié aux actifs des collectivités locales endettées à travers les pays nordiques, ce qui nous permet d'investir dans des actifs core /core+, alors que le core est devenu difficile d'accès aujourd'hui. Il faut dire que les pays nordiques sont très sensibles à la question de l'autosuffisance énergétique, ils n'importent que très peu d'énergie, la Suède ayant souvent les prix les plus bas du marché européen.
Il n'y a pas que la géothermie qui est exploitée mais aussi l'énergie des centres de données…
A Hamina, dans le sud-est de la Finlande, une grande partie de l'approvisionnement en énergie du réseau de chauffage provient du recyclage de l'énergie des data centers de Google : leur "waste energy" qui sans cela serait gaspillée, est remise dans le système pour chauffer la ville.
Vous êtes également actifs dans l'immobilier...
Dans l'immobilier nous avons quelque 4,5 milliards d'euros investis exclusivement en Scandinavie, dans les segments logement social, résidentiel, bureaux, logistique. Ce marché qui a été relativement volatil ces dernières années est actuellement un peu plus calme. Nous mettons l'accent sur la partie ESG : nous avons notamment plusieurs projets de réhabilitation. A Copenhague, nous avons aménagé le siège du BCG (Boston Consulting Group) dans une ancienne brasserie Heineken. Nous avons également équipé les bâtiments d'une prison et d'un tribunal avec le plus grand système de panneaux solaires intégrés de Scandinavie.
Un de vos derniers investissements concerne la forêt…
Dans le domaine des forêts nous avons racheté en avril dernier la société finlandaise Dasos qui investit dans des forêts en Europe : elle les achète et les exploite, avec la vente du bois à intervalles réguliers mais elle perçoit aussi des loyers pour l'installation des panneaux solaires ou d'éoliennes. En France, ce secteur est seulement perçu comme un moyen de défiscalisation, alors qu'il peut rapporter 7 à 8% en rythme annualisé, sachant que c'est une classe d'actifs totalement décorrélée des marchés, ce qui explique qu'elle commence à faire son chemin dans les portefeuilles des institutionnels.
Propos recueillis par Matthieu Richard-Molard