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Actions européennes : une année favorable à la value ? 

Publié le 23 février 2022 à 13h36

Catherine Rekik    Temps de lecture 19 minutes

Les actions restent la classe d’actifs à privilégier en 2022, malgré les inquiétudes toujours liées à la pandémie, l’inflation, les questions relatives à l’évolution des politiques monétaires et les tensions géopolitiques.  Plusieurs questions se posent :
• L’environnement économique restera-t-il favorable à la zone euro ? - Quid de l’inflation et de ses conséquences pour les marchés ? Que peut-on attendre de la BCE ? 
• Les actions européennes pourraient-elles résister à une correction des marchés boursiers américains ? Quels sont les principaux risques pour la classe d’actifs ? 
• Que penser des niveaux de valorisation ? - Faut-il arbitrer entre différents secteurs ?Préférer un style de gestion à un autre ?
• Comment profiter ou se préserver des fortes rotations ?

De gauche à droite : Frédéric Tassin, directeur de la gestion actions, Ofi Invest Asset Management, Yann Giordmaïna, gérant actions européennes, Tocqueville Finance, Anthony Bailly, gérant, Rothschild & Co / ©Christopher Salgadinho

Quelle lecture faites-vous de l’environnement dans lequel évoluent les marchés actuellement, depuis le début de l’année ?

Yann Giordmaïna : Ce début d’année est un retour à la réalité. Après de nombreux discours sur le côté transitoire de l’inflation, le marché a pris acte du caractère plus durable de cette inflation et de son impact sur la remontée des taux. Il y avait un décalage entre le niveau des taux et le niveau de l’inflation, voire le niveau de l’activité économique. A cet ajustement plutôt brusque se sont ajoutées des tensions géopolitiques.

Frédéric Tassin : L’inflation a changé de nature. Durant toute l’année 2021, les anticipations d’inflation n’ont cessé de remonter, mais le marché y a assez peu cru. On a d’ailleurs vu, au cours du troisième trimestre, des anticipations d’inflation s’envoler alors que les taux d’intérêt baissaient aux Etats-Unis. Une situation complexe avec un marché qui avait une vision très monétariste de l’inflation et qui a considéré que les goulets d’étranglement constatés ici ou là suffisaient à expliquer les résurgences inflationnistes. Le marché a considéré que ces tensions se dissiperaient avec la réouverture des économies. Le temps passant, les effets de second tour se sont fait ressentir, plus aux Etats-Unis qu’en Europe, comme le montrent les derniers chiffres de l’inflation américaine avec toutes les composantes en hausse : matières premières, salaires et logement. Nous avons désormais le sentiment que les banques centrales naviguent à vue et, au fur et à mesure qu’elles ajustent leurs actions, la prime de risque se matérialise.

Anthony Bailly : Il y avait déjà eu quelques signaux au cours de l’année dernière, mais souvent occultés par la situation sanitaire. Le décalage entre le niveau d’inflation et les taux est terminé, c’est la fin d’un long cycle durant lequel les banques centrales ont clairement aidé les marchés. Nous entrons dans une phase de normalisation. Le contexte actuel se caractérise par une forte croissance économique et une inflation soutenue. Celle-ci n’est pas que conjoncturelle et s’explique également par des éléments structurels tels que la transition énergétique. Il n’y a plus de doute sur les resserrements monétaires à venir et sur la volatilité qui va régner sur les marchés dans les mois à venir.

Les grandes banques centrales ont longtemps agi de concert. Risque-t-on désormais d’avoir un décalage dans le temps des décisions en matière de remontée des taux ?

Frédéric Tassin : L’équation de la Banque centrale européenne sera plus complexe à résoudre que celle de la Réserve fédérale. Aux Etats-Unis, face à une inflation assez classique, la politique monétaire a cherché à réduire un peu l’activité économique sans la faire trébucher. Du côté de la BCE, il faut à la fois ralentir un peu pour éviter que l’inflation atteigne des niveaux non souhaités, mais continuer aussi à accélérer, car il faut de la croissance économique et des recettes fiscales pour faire face à l’endettement élevé des Etats. Elle doit aussi piloter le risque de fragmentation de la zone euro.

Yann Giordmaïna : La situation est d’autant plus complexe que la BCE a été très active en achetant par exemple 100 % de certaines souches. Les marchés vont devoir s’adapter à un retour à la normale. Les intervenants privés sauront-ils faire le travail de compensation ? Rien n’est moins sûr…

Anthony Bailly : Il n’y aura pas de découplage des politiques monétaires, puisque la BCE finira par suivre le chemin de la Réserve fédérale. Les niveaux de taux commencent d’ailleurs à l’intégrer, puisque le Bund est repassé en territoire positif et que les taux réels ont rebondi.

La visibilité sur la croissance économique est-elle meilleure dans la zone euro qu’aux Etats-Unis ?

Anthony Bailly : Il est difficile de savoir si la visibilité est meilleure, mais il y a plusieurs forces de soutien dans la zone euro : l’effet restockage qui va aider la croissance, les plans de relance, les investissements, l’effet richesse avec un taux d’épargne élevé qui pourrait soutenir la consommation. Cependant, si la bosse de l’inflation dure plus longtemps que prévu et que les taux remontent trop violemment, cela pèsera sur la croissance.

Des hausses des taux sont-elles actées en 2022 pour la zone euro ?

Yann Giordmaïna : Pour l’instant, il y a un consensus sur l’arrêt du quantitative easing durant l’été, mais rien n’est clair en matière de hausse des taux. Il ne faut pas oublier que la taille du bilan de la banque centrale a doublé une première fois entre 2008 et 2018, puis une deuxième fois entre 2019 et 2022 !

Frédéric Tassin : Rien n’est clair en effet, le discours récent de Christine Lagarde a rapidement été tempéré par crainte d’un écartement entre les pays de la zone euro et de la réaction des marchés si le message envoyé était trop négatif.

Anthony Bailly : Le vrai risque serait une remontée trop rapide des taux, ce qui aurait des impacts négatifs sur la croissance. C’est ce que nous voyons aujourd’hui dans l’aplatissement des courbes, c’est le signal qu’envoie le marché obligataire.

«Au-delà de la vision générale sur la valorisation du marché, ce sont surtout les écarts de valorisation à l’intérieur du marché qui nous intéressent. »

Yann Giordmaïna Gérant actions européennes ,  Tocqueville Finance

Les perspectives de croissance économique sont-elles très différentes d’un pays à l’autre dans la zone euro ? Cela crée-t-il des disparités entre les places boursières ?

Frédéric Tassin : L’Allemagne est restée plus longtemps confinée que les autres pays de la zone euro l’an dernier. Du coup, elle est un peu apparue comme le parent pauvre des marchés financiers, et le Dax a affiché une contre-performance par rapport aux autres indices européens. L’économie allemande est très dépendante de la Chine, dont la situation semble s’éclaircir : la courroie du crédit recommence à fonctionner, ce qui incite les entreprises chinoises à investir de nouveau. L’Allemagne pourrait tirer son épingle du jeu. En ce qui concerne les autres économies de la zone euro, elles sont assez différentes. Quoi qu’il en soit, le marché ne jouera vraisemblablement pas les pays dans la zone euro en fonction de l’évolution des taux d’intérêt.

Yann Giordmaïna : Il y a un point dont on ne parle plus beaucoup ces derniers mois, c’est le change. S’il y a un décalage de politique monétaire entre les Etats-Unis et la zone euro, cela peut entraîner des effets de change importants, notamment une revalorisation du dollar. Un euro plus faible en relatif favoriserait alors l’économie allemande.

Frédéric Tassin : Les facteurs de demande sont bien présents, mais nous ne sommes pas à l’abri d’une erreur de politique monétaire qui pèserait sur la croissance. C’est ce qui inquiète les marchés aujourd’hui. Mais, fondamentalement, nous avons plusieurs raisons de croire qu’un phénomène de rattrapage est toujours à l’œuvre en Europe. L’incertitude sur l’offre devrait se résorber dans le courant du second semestre donc, si tout se passe bien, la zone euro sera bien en croissance économique en 2022.

Yann Giordmaïna : La crise du Covid-19 date de février 2020 pour les marchés mais, à partir de 2018, il y avait déjà un ralentissement industriel général. Les entreprises étaient déjà attentives à leurs niveaux de stocks et avaient resserré les coûts. Les quelques signaux de reprise économique perceptibles à la fin de l’année 2019 ont été balayés par la pandémie. Tout plaide aujourd’hui en faveur d’un nouveau cycle économique avec la reprise des stocks et l’investissement.

Anthony Bailly : Tout cela se voit dans les bilans des sociétés. Les niveaux d’endettement sur fonds propres se sont considérablement améliorés depuis fin 2019, c’est un gage de solidité financière des entreprises européennes.

Frédéric Tassin : L’évolution des carnets de commandes est également très favorable. Beaucoup d’entreprises industrielles ont une bonne visibilité sur leur activité. Par conséquent, tant au niveau macroéconomique qu’au niveau microéconomique, l’environnement est relativement sain.

Anthony Bailly : Le niveau d’attente des bénéfices plaide également en faveur des marchés actions européens. Le consensus table sur une progression de 7 % avec des perspectives de croissance économique autour de 4 %. Cela suppose un impact très fort des coûts des intrants sur les marges. Or, dans nos discussions avec les sociétés, nous constatons qu’elles parviennent à passer des hausses de prix sans trop de difficultés. Dans certains secteurs, les prévisions nous semblent donc très conservatrices.

Frédéric Tassin : La capacité des entreprises à passer des hausses des prix est sans doute un élément qui inquiète beaucoup les banques centrales. 61 % des entreprises américaines ont relevé leurs prix durant ces trois derniers mois, et plutôt durant la quinzaine écoulée. La dynamique à l’œuvre n’est pas près de s’arrêter, ce qui crée de la nervosité chez les banquiers centraux, lesquels redoutent des hausses de salaires dans la foulée, et donc des effets de second tour.

Plusieurs éléments plaident donc en faveur des actions européennes. Peut-on pour autant anticiper une surperformances de ces dernières ? La classe d’actifs peut-elle résister à une forte baisse des marchés américains ?

Anthony Bailly : Oui, la situation est favorable à la classe d’actifs, mais il faut rappeler que la composition des indices est très différente en Europe, cyclique et financière, et aux Etats-Unis, plus orientée croissance. Or, l’environnement actuel est plutôt favorable aux valeurs cycliques et financières.

Yann Giordmaïna : La structure des indices américains fait la part belle aux valeurs technologiques qui ont des durations longues. Quand ces valeurs corrigent, l’impact sur l’indice est plus fort qu’en Europe. Reste la question des flux. En effet, si les investisseurs américains sortent des marchés européens, l’impact sera important. Quoi qu’il en soit, le marché actions américain donne quand même toujours la tendance.

Anthony Bailly : Tout dépend de l’ampleur de la correction. Si elle est du même ordre que ce que nous avons connu récemment avec des taux autour de 2 % aux Etats-Unis et de 1 % en Europe, ça ne devrait pas avoir trop de conséquences. Dans cette configuration, les secteurs de croissance seront plus impactés et les secteurs cycliques et financiers, beaucoup plus présents dans les indices européens, en profiteront. En cas de forte correction des indices aux Etats-Unis et de désengagement global des actions, l’Europe sera amenée à sous-performer. Si nous restons dans l’environnement actuel et que les banques centrales parviennent à naviguer dans ces eaux troubles, on peut imaginer une période de surperformance de l’Europe. D’ailleurs, dans ces périodes-là, les valeurs « value » surperforment souvent les valeurs de croissance.

Frédéric Tassin : On peut bien sûr imaginer une correction plus ou moins sévère, mais dans quelle autre classe d’actifs investir ? Quelle est la valeur refuge dans un monde inflationniste ? Il y a peu de solutions. Il faut garder à l’esprit que les actions sont des actifs ancrés dans la réalité, que les entreprises sont capables de s’adapter rapidement à un environnement changeant : elles ont adapté leurs outils de production, leurs politiques commerciales, elles réfléchissent à l’évolution de leurs chaînes logistiques, etc.

Yann Giordmaïna : Depuis plus d’une décennie, les entreprises ont fait de gros efforts d’adaptation, voire de restructuration. Et les effets bénéfiques se voient aujourd’hui. Dans beaucoup de secteurs, les sociétés, quelle que soit leur taille, opèrent sur des niches et imposent des hausses de prix presque instantanément, car le client n’a pas d’autre choix. Elles ont des parts de marché incontournables dans leurs niches d’activité.

«Le retour sur les fondamentaux permettra aux gérants de mieux faire leur travail, alors qu’auparavant tout était faussé par les biais style. »

Anthony Bailly Gérant ,  Rothschild & Co

Les particuliers ont manifesté plus d’intérêt pour la Bourse depuis la pandémie. Est-ce que cela se matérialise dans les flux ? La bascule des fonds en euros vers les unités de compte favorise-t-elle la classe d’actifs ?

Frédéric Tassin : Ce mouvement, qui a commencé il y a quelques années avec la volonté des épargnants de diversifier leur épargne, devrait perdurer, mais il y a quand même un véritable attachement au fonds en euros. La bascule vers des placements plus risqués prendra, selon nous, du temps.

Anthony Bailly : Le regain d’intérêt des particuliers pour la Bourse est surtout notable aux Etats-Unis. C’est assez spectaculaire, car environ 40 % des flux sur les actions proviennent des particuliers. L’Europe est très loin de ça : les flux sont plus importants, mais pas du tout dans les mêmes proportions que les flux américains.

Que peut-on dire des valorisations des actions européennes ? Est-ce que ça a encore du sens, en outre, de comparer les valorisations des différents marchés ? Faut-il plutôt s’intéresser aux différences entre les secteurs ?

Yann Giordmaïna : Le marché européen est toujours moins cher que le marché américain. Au-delà de la vision générale sur la valorisation du marché, ce sont surtout les écarts de valorisation à l’intérieur du marché qui nous intéressent. Les investisseurs ont plutôt privilégié, ces dernières années, des facteurs à des histoires d’entreprises, des cas d’investissements ou même des secteurs. A l’intérieur des secteurs, les écarts de valorisation peuvent être très importants aussi, comme le montre l’exemple des biens d’équipement.

Frédéric Tassin : Les multiples de valorisation en Europe se sont comprimés en 2021, puisque les marchés ont progressé de plus de 30 % et les bénéfices de plus de 50 %. Et même l’an dernier, lorsque les marchés étaient censés être les plus chers, on trouvait des valeurs à acheter à des prix raisonnables. Il y avait dans le marché des valeurs excessivement chères et d’autres au tapis : il était possible d’acheter des valeurs avec un rendement du dividende de 6 ou 7 %. C’est toujours le cas aujourd’hui avec un marché ni décoté ni trop cher, qui offre beaucoup d’opportunités.

Anthony Bailly : Le marché européen se paie environ 15 fois les prévisions de profits. Dans certains secteurs comme la construction, les banques, l’automobile, l’énergie, etc., les PER sont inférieurs à 10, tandis que les valeurs de croissance, malgré la correction, se paient toujours plus de 20 fois, car les flux se sont concentrés très longtemps sur certaines valeurs qui se retrouvaient dans tous les fonds ESG, croissance, thématique, etc. Ces valeurs étant encore beaucoup trop chères, il y a un regain d’intérêt pour les secteurs délaissés comme les banques pénalisées par la faiblesse des taux ou les valeurs pétrolières en raison des arbitrages d’investissements à réaliser en faveur de la transition énergétique.

Frédéric Tassin : Les valorisations sont importantes. On ne peut pas décorréler un actif et sa rentabilité de sa valeur de marché. Et pourtant, c’est ce qui s’est passé ces dernières années : seule la croissance a été valorisée ! Certaines sociétés se sont payées très cher uniquement à cause de la croissance de l’activité, alors qu’elles réalisaient des pertes. Elles ont fortement corrigé alors que rien n’avait changé si ce n’est la perception du marché qui reprenait subitement conscience de l’importance des qualités financières d’un actif.

Faut-il pour autant arbitrer la croissance pour la « value » ?

Anthony Bailly : Oui, au moins partiellement pour trois raisons : les éléments macroéconomiques évoqués justifiant une normalisation des taux ; la faible valorisation associée à une bonne dynamique des résultats ; et le peu d’exposition des investisseurs à ces secteurs et valeurs de type « value ».

Yann Giordmaïna : Il ne faut pas opposer la croissance et la « value ». C’est une lecture caricaturale du marché fondée sur des facteurs. Ce n’est pas ça, investir. Il ne faut pas croire qu’un gérant croissance ne regarde pas la valorisation, mais il le fait de façon différente. La lecture du marché est en train de changer et revient plus vers les fondamentaux.

Frédéric Tassin : Pendant des années, le marché s’est détourné de la « value ». Qui sait ? Peut-être se passera-t-il la même chose pour les valeurs de croissance, ce qui amènera les gérants « value » à prendre des positions sur des actifs de qualité qui seraient décotés par rapport à leur moyenne historique. Tout dépend de la définition que l’on a de la « value ».

«Il faut garder à l’esprit que les actions sont des actifs ancrés dans la réalité, que les entreprises sont capables de s’adapter rapidement à un environnement changeant. »

Frédéric Tassin Directeur de la gestion actions ,  Ofi Invest Asset Management

A ce propos, comment la définissez-vous ?

Yann Giordmaïna : La « value » se définit par un décalage entre la valeur intrinsèque d’une société et sa valeur boursière, c’est-à-dire ce que le marché est prêt à payer pour de bonnes ou de mauvaises raisons. Dans beaucoup de secteurs, il peut y avoir des valeurs « value ». Il peut y avoir des éléments conjoncturels, de cycle et de catalyseur qui permettent de libérer cette valeur dans le marché.

Frédéric Tassin : Prenons un exemple emblématique : ASML a été la star incontestée des valeurs technologiques pour de très bonnes raisons mais, il y a quelques années, sa valorisation s’est effondrée car elle n’arrivait pas à mettre au point sa nouvelle génération de machines. Elle n’était pas « value » au sens strict du terme, mais elle était très décotée. Des sociétés de qualité peuvent donc avoir des accidents industriels et être durement sanctionnées par les investisseurs qui, en général, se focalisent sur des résultats à six ou douze mois.  Avec patience, il est possible d’investir dans des actifs de grande qualité à prix bradés. Ce qui est important pour un gérant « value », c’est bien l’écart entre le cours de Bourse et la valeur estimée d’un actif.

Anthony Bailly : La capacité d’un gérant value est de trouver la raison pour laquelle une valeur est décotée et de déterminer sa capacité à retrouver sa marge normative. Parfois, les raisons sont exogènes – les taux d’intérêt ont beaucoup pesé sur les valorisations –, mais les fondamentaux sont bons. Les investisseurs craignent le risque de « value trap », mais les bilans sains, les bénéfices par action en forte hausse et un intérêt nouveau lié à la normalisation des taux forment un triptyque intéressant.

Dans certains secteurs comme les financières, la décote a longtemps été liée à la difficulté de valoriser ces titres. La remontée des taux est-elle suffisante pour revenir sur les valeurs bancaires, par exemple ? Quelles sont les autres opportunités secto

Anthony Bailly : Les banques sont un bon exemple : comparé à 2007, les ratios de solvabilité sont sans commune mesure, les bilans sont solides et les bases de coût sont faibles. A cela s’ajoutent les taux qui remontent, donc les marges d’intérêt vont mieux, la consolidation du secteur, les plans de rachats d’actions, etc. Tous ces éléments justifient que le price-to-book des banques soit supérieur à 0,7 fois. Dans l’automobile, c’est la même chose. Stellantis parvient à passer des hausses de prix sur toute sa gamme, et il est peu probable que ces prix baissent quand les volumes reviendront. Idem pour Saint-Gobain, qui a relevé ses prix à cinq reprises l’an dernier et qui va bénéficier de volumes plus importants grâce aux plans de relance.

Frédéric Tassin : En ce qui concerne le secteur du pétrole, il y a toujours des interrogations sur la valorisation. Le marché n’est pas très bienveillant à l’égard des sociétés du secteur pour des considérations ESG mais, pour ceux qui ont la capacité d’investir dans ces valeurs aujourd’hui, cela pourrait être rémunérateur avec un baril à 100 dollars. Il y a aussi des opportunités intéressantes dans le secteur des utilities, du tourisme ou des loisirs dès lors que l’on veut prendre un pari sur les valorisations.

Yann Giordmaïna : C’est tout le travail du stock picker de trouver des valeurs délaissées dans de nombreux secteurs. Pour revenir sur les banques, elles ont pâti pendant des années d’une chape de plomb réglementaire. Les mauvaises nouvelles venaient beaucoup des régulateurs, mais c’est du passé. Quel que soit le secteur, il faut être attentif à l’évolution des modèles.

Comment aborder la classe d’actifs dans le contexte actuel ? Comment se prémunir de la volatilité ?

Frédéric Tassin : Pour répondre aux inquiétudes des clients et essayer de gérer la volatilité, nous recommandons à nos réseaux de mettre en place des investissements programmés, car il est très difficile de déterminer des points d’entrée et de sortie.

Yann Giordmaïna : Les marchés sont aujourd’hui moins lisibles. Il peut y avoir des à-coups très forts sur un style de gestion en quelques semaines. Si la situation se normalise, les à-coups vont disparaître progressivement. Il y aura moins de tendance lisible, donc moins d’arbitrages entre la croissance ou la « value » et moins d’écarts de valorisation, ce qui peut perturber les allocataires d’actifs et les clients.

Anthony Bailly : Le retour sur les fondamentaux permettra aux gérants de mieux faire leur travail, alors qu’auparavant tout était faussé par les biais style. Un retour dans un univers plus normalisé conduira à davantage de diversité au sein des indices, avec des valeurs aux parcours différents, mais aussi de disparités entre les performances des gérants. 

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