Les investisseurs font face à une démultiplication des risques, monétaires, inflationnistes, géopolitiques, sociaux… ce qui induit une hausse significative de la volatilité sur les marchés. Passage en revue des stratégies les plus adaptées pour faire face à cet environnement avec Adil Amor, Directeur Général de Schelcher Prince Gestion.
Quelle est votre lecture du marché ?
La tournure dramatique prise par le conflit Russie/Ukraine correspond à ce que l’on qualifie mathématiquement d’un « évènement de queue de distribution », c’est à un dire un scénario dont la probabilité de réalisation est quasiment nulle. Ce point est central, puisque nous pensons aujourd’hui que la probabilité de réalisation des évènements extrêmes a significativement augmenté. Le principal risque auquel nous devons faire face actuellement, eu égard à l’ampleur de cette guerre, est lié à la persistance des pressions inflationnistes sur le long terme non seulement avec la hausse des prix de l’énergie, mais aussi avec le renchérissement des produits alimentaires. La durabilité d’une inflation sur les denrées alimentaires pourrait avoir pour corolaire immédiat une exacerbation des risques sociaux dans le monde émergent mais aussi dans le monde développé.
Finalement, la multiplication des risques –monétaires, géopolitiques, inflationnistes alimentaires et sociaux – se traduit par une hausse importante de la volatilité sur les marchés et nécessite d’intégrer des primes de risque additionnelles dans les valorisations des actifs risqués.
Quelle approche préconisez-vous ?
Les cycles d’investissement s’étant raccourcis significativement, les décisions se prennent pour une semaine ou tout au plus pour un mois, les horizons tactiques qui prévalaient avant la crise du Covid sont devenus les horizons stratégiques de nos allocations. Aussi, les allocations directionnelles au marché (le « béta »), sont gérées dans une logique de « stop-and-go » ce qui permet de constituer progressivement des profits à travers une gestion agile dans des intervalles de variations bien définis. A titre d’exemple sur le 10 ans allemand, l’intervalle d’exposition que nous retenons aujourd’hui est compris entre 30 pbs et 70 pbs. Le « bottom up », quant à lui, est piloté selon une approche de fond de portefeuille. Sur le marché du crédit, nous choisissons des titres de duration courte, la solvabilité des émetteurs sur une échéance courte peut être appréciée avec un degré de confort significatif. Le marché du « high yield » regorge d’opportunités intéressantes en Europe comme dans le monde émergent, en Amérique du Sud par exemple. Le critère de choix technique demeure le portage offert relativement au point mort obligataire, c’est-à-dire la hausse de la prime de risque maximale autorisée sans altérer le nominal. Plus ce point mort est élevé, plus la protection en cas de stress de marché est substantielle.
Enfin, il est indispensable de garder à l’esprit qu’un portefeuille n’est pas simplement un empilement de stratégies d’investissement, il est essentiel d’adopter une calibration chirurgicale du risque embarqué selon une vue globale pour garantir que le risque de baisse est bien en phase avec le niveau acceptable pour l’investisseur. L’objectif ultime est de construire un portefeuille présentant un potentiel de gain significativement supérieur au risque de baisse maximal (en valeur absolue), ce que l’on définit comme étant la convexité.
Quelles solutions d’investissement, tenant compte de ces impératifs, proposez-vous aux investisseurs ?
Sur les actifs cotés, nous pensons que la gamme obligataire de retour absolu proposée par Schelcher Prince Gestion répond aux problématiques de la physionomie actuelle des marchés. En effet, nous gérons deux fonds, Schelcher Optimal Income ESG (objectif de performance Ester Capitalisé + 300 bps) et Schelcher Flexible Short Duration ESG (Ester Capitalisé + 200 bps), qui cumulent l’agilité « top down » et la sélectivité « bottom up » qui constituent selon nous les deux piliers de la gestion obligataire de l’ère post Covid.
Et en ce qui concerne les actifs non cotés ?
Les actifs non cotés, particulièrement ceux liés à la dette, constituent une classe d’actifs à part entière dans un environnement de marché volatil. En contrepartie de son investissement sur une période prédéfinie, l’investisseur reçoit une prime d’illiquidité et ne subit qu’une volatilité modérée comparativement aux marchés cotés. La sélectivité des émetteurs couplée à un processus de gestion des risques précis représentent les deux éléments centraux de telles stratégies. L’avantage majeur vient également du fait que les financements réalisés au travers de cette classe d’actifs sont généralement effectués avec des coupons à taux variables, ce qui constitue une protection naturelle dans un scénario de reflation avec une hausse des taux nominaux.
Nous disposons, chez Schelcher Prince Gestion, d’un pôle d’expertise axé sur la dette privée corporate, historiquement centré sur la dette senior. Le spectre d’investissement a été élargi à la dette mezzanine dans un contexte où la recherche de rendement devient de plus en plus stratégique. Enfin, une nouvelle activité sur la dette d’infrastructures visant à financer les transitions environnementales et digitales, a été lancée en 2021.