Pour Gilles Etcheberrigaray, directeur général et directeur des investissements d’Invest AM, il est primordial de combiner les caractéristiques des différentes classes d’actifs pour limiter les risques de marché et multiplier les sources de performances.
Les marchés connaissent actuellement une phase de turbulences. Comment l’appréhendez-vous ?
Notre gestion a pour objectif de construire des portefeuilles robustes qui s’adaptent à toutes les configurations de marché. Elle se caractérise par sa flexibilité, qui s’entend par son adaptabilité intellectuelle – nous ne retenons pas un seul scénario central mais nous analysons en permanence plusieurs scénarios afin de savoir comment réagir si les choses ne se passent pas comme prévu – et par la diversification des investissements. De fait, nous utilisons tous les actifs cotés et liquides existants sur les marchés mondiaux.
Cette approche nous a pour le moment permis de passer l’obstacle du conflit russo-ukrainien, les trois fonds de notre gamme Invest Latitude affichant à ce jour des niveaux de volatilité maîtrisés et des performances positives depuis le début de l’année*. Notre objectif est d’apporter de la sérénité à nos clients à travers nos décisions de gestion (rappelons que nous n’utilisons pas l’effet de levier et que nous ne nous exposons pas à des instruments illiquides), en délivrant de la performance dans la durée.
Quels sont les différents points d’attention que vous retenez à court et à moyen termes ?
Nos portefeuilles sont actuellement construits en fonction de trois éléments.
Il s’agit tout d’abord du conflit russo-ukrainien et de la problématique de l’énergie qui y est rattachée, mais qui est bien plus profonde. Le conflit met en évidence la dépendance de l’Europe pour ses approvisionnements en gaz. Nous sommes en train de nous rendre compte que certaines énergies carbonées, mais aussi les minerais comme le cuivre et le nickel, sont des éléments nécessaires de la transition énergétique, dans lesquels nous n’avons pas suffisamment investi ces dernières années.
Autre élément que nous suivons de près : la hausse des taux enclenchée par la Fed dans un contexte de ralentissement économique, le défi étant de parvenir à un soft landing, ce qui a rarement été le cas lors des précédentes phases de hausse de taux de la Banque centrale américaine.
Il va également falloir suivre l’évolution de la Chine à moyen terme, le risque de ralentissement économique étant réel. Si les autorités veulent que la croissance reste à un niveau élevé de 5 à 6 % par an, elles devront continuer à réaliser des investissements non productifs dans l’immobilier et les infrastructures publiques. Mais si elles décident de réduire la dépendance de l’économie à l’immobilier (qui a représenté jusqu’à 35 % du PIB), le rythme de croissance annuelle de l’économie chinoise risque de redescendre autour de 2 à 3 % seulement.
Sur quels types d’actifs avez-vous actuellement des convictions marquées ?
Nous sommes exposés aux valeurs énergétiques qui, de notre point de vue, s’en sortiront bien dans toutes les configurations de marché : les tensions géopolitiques, tout comme la transition énergétique, leur sont favorables. De fait, pour assurer une transition pérenne, mieux vaut que le prix des matières premières soit élevé (on décarbone plus rapidement avec un baril de pétrole à 110 dollars !). Par ailleurs, il faut travailler dans toutes les directions pour réaliser cette transition. Dans sa taxonomie, l’Union européenne a d’ailleurs reconnu le rôle du gaz naturel, qui est l’énergie carbonée la plus propre. Nous adhérons pleinement à cette approche politique, qui établit une hiérarchie des énergies en fonction des exigences de la TEE mais aussi en tenant compte de la réalité des choses, et notamment de l’intermittence des énergies alternatives.
Les émergents (hors Chine), qui ont été massacrés et qui bénéficient de l’envolée des prix des matières premières, nous semblent également recéler des opportunités, tant au niveau des actions que des obligations et des devises (qui sont au plus bas), mais à des degrés différents selon les pays.
Enfin, l’or nous semble intéressant dans une optique de moyen terme.
*Données au 25/03/2022.