Table ronde

ETF : à la conquête de la distribution intermédiée

Publié le 23 juin 2023 à 15h01

Catherine Rekik

Les ETF battent des records d’encours et attirent de nouveaux entrants. Le poids de la gestion passive n’a cessé de croître aux Etats-Unis, mais aussi en Europe où le développement s’accélère. Ils restent cependant peu utilisés dans la distribution intermédiée, notamment par les CGP, et encore faiblement représentés dans les contrats d’assurance-vie. Or, en dehors des frais attractifs, les ETF ne manquent pas d’atouts et l’offre est en constante évolution. Comment s’est développée la gestion passive en France ces dernières années ? Comment évolue l’offre ? Comment la gestion passive s’adapte-t-elle à la demande croissante pour des produits ISR ? Quelles sont les dernières innovations ? Qu’est-ce qu’un ETF géré activement ? Comment expliquer l’engouement pour ces produits ? Ce relais de croissance peut-il séduire la distribution intermédiée, voire le retail directement ? Quels sont les atouts des ETF dans une allocation d’actifs ? Quels sont les facteurs qui peuvent favoriser l’essor des ETF auprès de la distribution intermédiée ? 

De gauche à droite (photos ©Esther Baron) : 

  • Jérémy Tubiana, responsable du développement ETF & solutions indicielles France, Belgique, Luxembourg, Monaco et Suisse francophone, BNPP AM
  • Guy Parent, responsable France, Vanguard  
  • Ludovic Djebali, directeur State Street Global Advisors France et responsable SPDR ETF France Belgique Luxembourg
  • Jean-François Bay, directeur général, Quantalys
  • Olivier Paquier, responsable mondial des ventes ETF, AXA IM

Comment s’est développé le marché des ETF en France ces dernières années ? Quelles sont les spécificités de ce marché ? Est-il comparable aux autres marchés européens ? 

Jean-François Bay - Au niveau mondial, le poids des ETF représente aujourd’hui 33 % des actifs gérés contre 7 % en 2000. Sur la base des chiffres de Quantalys pour l’Europe, les ETF représentent 14 % de l’industrie des fonds distribués contre 6 % il y a dix ans. La dynamique de croissance se poursuit. En ce qui concerne les flux, l’année 2022 a été particulière pour l’industrie en général, qui a souffert d’un effet marché négatif et de la décollecte. Cependant, les ETF ont continué à collecter en Europe en 2022 et la tendance se poursuit en 2023. A fin avril, la collecte s’élève à 57 milliards d’euros pour les ETF et à 15 milliards pour les fonds actifs. Les ETF continuent donc de prendre des parts de marché dans le monde et en Europe.

Jérémy Tubiana - Ce gain de parts de marché s’explique par un élargissement de la base de clients. Rappelons les statistiques : aux Etats-Unis, 50 % des encours ETF sont détenus par des investisseurs particuliers alors qu’en Europe, les institutionnels en détenaient 90 % jusqu’à récemment. La part de 10 % détenue par la clientèle retail tend à se développer. C’est déjà le cas dans les pays qui ont interdit les rétrocessions, comme le Royaume-Uni. Et la tendance se confirme clairement en Allemagne ou en France. Plusieurs raisons l’expliquent : le système de retraite évolue, les livrets d’épargne traditionnels ont été longtemps peu rémunérateurs et leurs taux actuels ne protègent toujours pas contre l’inflation et, enfin une nouvelle génération arrive en prônant le « do it yourself ». Cette jeune génération se rend compte de l’existence de cette tendance de marché, tout en étant consciente qu’elle doit préparer sa retraite elle-même et qu’elle ne peut plus se contenter du système de retraite par répartition ou du fonds en euros. Elle peut soit s’adresser à un intermédiaire financier, mais n’en a pas forcément les moyens, soit se tourner vers les plateformes digitales ou les robo-advisors et investir principalement dans les ETF, car ils répondent clairement à leurs besoins : des produits simples, transparents, liquides et avec des frais réduits. Les ETF cochent toutes les cases que recherche cette fameuse génération « do it yourself », donc la répartition du marché des ETF que nous avons connue par le passé évolue plutôt vers un 15 % clientèle retail / 85 % clientèle institutionnelle.

Jean-François Bay - Cette évolution du marché des ETF ne s’explique pas uniquement par cette génération du « do it yourself », ces néo-brokers « digital native » qui investissent en direct, même si l’AMF a noté qu’il y avait une croissance de 76 % des investisseurs particuliers qui utilisent les ETF. Le développement des ETF auprès de la clientèle retail passe aussi par les réseaux de distribution, surtout via l’assurance-vie qui référence également de plus en plus d’ETF. Or, en France, lorsque l’on parle de gestion de patrimoine, l’assurance-vie est clé ! Aujourd’hui, 44 % des contrats d’assurance-vie référencent des ETF contre 38 % il y a un an. La moyenne des ETF référencés par contrat est passée de 20 à 31. Nous assistons ainsi à une montée en puissance du retail grâce à la génération de néobrokers sur des plateformes online et grâce aussi au développement dans la gestion de patrimoine, tandis que la partie institutionnelle reste importante. 

Guy Parent - Il existe différentes manières d’envisager le monde des ETF. De façon opportune, le découpage pourrait se faire entre deux approches sur l’utilisation des ETF avec d’un côté, une approche tactique via des produits investis sur une classe d’actifs pointue comme un pays, un secteur… et, d’un autre côté, une approche stratégique, avec des produits plutôt cœur de portefeuille sur des univers larges comme les actions Europe, les actions monde ou les fonds globaux. Nous assistons aujourd’hui à une vague de fond sur ces produits cœur de portefeuille qui sont de plus en plus employés. On les retrouve dans l’assurance-vie par exemple, dont l’approche est beaucoup moins tactique par essence. 

Les deux approches sont très complémentaires. Petit à petit, on commence à voir un changement dans ces actifs de long terme dans les PER ou l’assurance-vie, pour lesquels les ETF sont tout à fait adaptés dès lors qu’ils sont très larges et très diversifiés. 

Olivier Paquier - Ces dernières années, l’industrie de la gestion d’actifs a connu deux grandes tendances structurelles, le développement de l’ESG et celui de la gestion passive, dont les ETF bénéficient par ricochet. Entre 2003 et 2023, les encours globaux de la gestion indicielle ont été multipliés par 8 pour atteindre 24 000 milliards de dollars, dont près de la moitié en ETF. Dans le même temps, les encours en gestion active ont été multipliés par 1,5. L’offre étant déjà très complète, et ce depuis plusieurs années, il est normal que le taux de croissance soit inférieur, avec une croissance multipliée par 2 en Europe. 

Par ailleurs, dans le dernier rapport de l’EFAMA (2022) sur la gestion collective, j’ai trouvé un chiffre étonnant : il y a une vingtaine d’années, la gestion collective pour le compte d’investisseurs particuliers (dans lesquels les ETF s’inscrivent aussi) était proche de 10 %, alors que ce chiffre est passé à 27 % pour la France et il est de 28 % pour l’Europe. Historiquement, la gestion collective était donc plutôt orientée vers une clientèle institutionnelle. En 20 ans, la gestion collective pour le compte de particuliers a donc connu une progression intéressante aussi bien pour les fonds traditionnels que pour les ETF. Le développement de l’intermédiation de la gestion collective pour les investisseurs particuliers est également une tendance de fond.

Ludovic Djebali - Le marché européen des ETF s’est développé grâce aux clients institutionnels qui ont intégré dès le début des années 2000 ces instruments au sein de leurs allocations d’actifs, et la France a été parmi les premiers pays dans l’adoption des ETF. Il y a eu des évolutions aussi bien dans la cible de clients adressés que dans l’offre. Il y a vingt ans, les ETF commercialisés répliquaient les grands indices comme le CAC 40 ou l’EuroStoxx 50. Les développements ont été accélérés par les crises ; celle de 2009 a permis, par exemple, d’introduire certaines thématiques comme le smart beta. Entre 2015 et 2020, c’est l’offre d’ETF obligataires qui s’est enrichie et a été plus largement adoptée par les investisseurs. Aujourd’hui, l’ESG est un des principaux relais de croissance ainsi que le déploiement de l’offre pour la clientèle retail intermédiée, car même le particulier qui investit directement va être intermédié par une plateforme, un néobroker ou une banque privée. On est encore loin des 50 % de particuliers intermédiés sur le marché des ETF aux Etats-Unis, mais la tendance s’accélère enfin en Europe grâce notamment à l’Allemagne et à l’intégration des ETF au sein des plans épargne retraite qui sont passés de 700 000 à 3,8 millions en quelques années.

Jérémy Tubiana - Ces plans d’épargne retraite allemands sont l’équivalent de notre PER, mais sur un format compte-titres et non pas assurantiel, ce qui les rend très intéressants car beaucoup plus simples à ouvrir. 

Ludovic Djebali - L’essor de la clientèle intermédiée est de bon augure pour le marché européen des ETF, car aux Etats-Unis, leurs équivalents ont été un véritable relais de croissance pour ces produits. Au niveau européen, il est par ailleurs surprenant de constater qu’au 31 mars, selon les chiffres de Morningstar, la gestion active représentait 25 000 milliards de dollars, soit autant que l’ensemble constitué par la gestion passive et les ETF. Le différentiel qui existait entre gestion active et gestion passive s’est complètement résorbé, alors qu’il était de 11 000 milliards il y a dix ans. 

En Europe, la gestion active représente 8 000 milliards au 31 mars et la gestion passive 4 000 milliards. Les encours de la gestion active restent deux fois supérieurs, ils ont doublé en dix ans, mais les encours de la gestion passive et indicielle ont été multipliés par 3,5 sur la période. Il est donc intéressant de voir qu’au niveau de l’Europe, la dynamique est supérieure à celle des Etats-Unis. C’est en Europe que le taux de croissance des ETF est le plus élevé. 

Jérémy Tubiana - Pour revenir sur la génération « do it yourself », j’y inclus également les investisseurs qui vont utiliser les plateformes digitales, les courtiers en ligne, mais aussi l’assurance-vie. En effet, un investisseur autonome dans ses décisions va acheter un ETF dans son contrat d’assurance-vie via des fintechs digitales, des banques en ligne, etc. Il achète en général des indices très simples, du MSCI World, CAC 40, etc. 

Jean-François Bay - Par exemple, quand Boursorama Vie lance un PER, il est 100 % en ETF, ce qui confirme bien la tendance.

Jérémy Tubiana - C’est compliqué de trouver, parmi les lancements, un contrat d’assurance-vie qui n’intègre pas d’ETF, quel que soit le réseau de distribution. 

Jean-François Bay - Des assureurs traditionnels comme l’AFER ou Garance référencent désormais de plus en plus des ETF. Ce qui signifie qu’aux côtés des investisseurs institutionnels et des gérants de fonds de fonds qui ont une approche de long terme et de cœur de portefeuille, et des néo-brokers qui font plutôt du trading et vont investir dans des ETF très spécifiques (ETF leveragés, ETF sur des secteurs, ETF sur des matières premières…), il y a une nouvelle catégorie d’investisseurs en gestion de patrimoine.

Ludovic Djebali - Il y a une dichotomie intéressante à souligner. D’un côté, les grosses compagnies d’assurances lancent des contrats à base d’ETF, mais sur lesquels la collecte est faible parce que la distribution de ces contrats reste contenue. Il s’agit plutôt d’une offre « tête de gondole ». Et d’un autre côté, de nouvelles sociétés apparaissent – des néo-brokers, des plateformes, etc. –, et vont être très agressives, car elles savent que leurs offres correspondent à une tendance très forte. Donc, d’une part, les ETF sont de plus en plus référencés dans les contrats des gros assureurs vie, mais la collecte n’est pas au rendez-vous, et d’autre part, certains néobrokers et plateformes ont aujourd’hui 100 % de leurs encours investis en ETF sur de l’assurance-vie. Ce sont donc deux stratégies distinctes avec des dynamiques sous-jacentes complexes liées à des business models différents, dont un probablement plus adapté à la distribution des ETF, notamment dans la façon de traiter un ETF comme une action, qui requiert pour certains assureurs des développements complémentaires répondant à cette spécificité. 

Guy Parent - La tendance que nous considérons comme la plus significative concerne cette épargne que nous allons retrouver dans un PER, une assurance-vie et éventuellement dans d’autres dispositifs de long terme. C’est ce besoin de long terme qui touche tout un chacun et pour lequel nous voyons les ETF se développer petit à petit. A terme, cela peut constituer des volumes très importants alors que les investisseurs qui utilisent les ETF pour investir dans les matières premières ou un secteur en particulier, par exemple les banques ou les valeurs technologiques, ne vont pas représenter des volumes aussi importants au final.

Olivier Paquier - La France est assez différente des autres marchés européens, à l’exception peut-être de l’Allemagne dont les structures de marché sont plutôt similaires. En France, la distribution intermédiée auprès des particuliers est assez mature. Et, comme pour tout marché mature, l’innovation est incontournable. La France est un marché piloté par la gestion sous mandat, l’assurance-vie et les CGP qui ont connu une très forte croissance ces dernières années, grâce à leur proximité avec les clients particuliers et leur capacité à leur offrir du conseil. Si les fournisseurs d’ETF doivent « former » ces intervenants traditionnels à l’intérêt de l’instrument ETF, les nouveaux acteurs tels que les néobanques ou les plateformes de trading digitales ont rapidement saisi ses avantages et les ont positionnés au cœur de leur offre au démarrage de leurs activités. L’écosystème des ETF a évolué et s’est mieux adapté à ces nouveaux acteurs qu’aux acteurs historiques, à la fois pour des raisons technologiques, de prix, de disponibilités en Bourse, mais aussi pour des questions de rémunération. Nous devons franchir aujourd’hui une autre étape et accompagner les acteurs historiques.

«On commence à voir un changement dans les actifs de long terme, dans les PER ou l’assurance-vie, pour lesquels les ETF sont tout à fait adaptés dès lors qu’ils sont très larges et très diversifiés. »

Guy Parent Responsable France ,  Vanguard

Les rétrocessions sont-elles le seul frein à l’utilisation des ETF par les CGP ? 

Olivier Paquier - La problématique des rétrocessions est en effet un frein, mais ce n’est pas le seul. Les CGP sont souvent comparés aux IFA (Independent Financial Advisors) au Royaume-Uni, mais il existe une grande différence entre ces deux modèles. En France, le marché est vaste et éparpillé, les CGP sont encore peu regroupés et ils ont besoin soit de blockbusters en termes de fonds ou d’ETF, soit d’expositions très spécifiques. Les ETF ayant souvent des expositions assez « vanille » rentrent difficilement dans les allocations. Ce n’est donc pas qu’une question de rémunération, c’est également une question de structure d’offre de marché. Mais un des atouts de la France est que nous avons, en général, des interlocuteurs techniques et plutôt bien formés.

Ludovic Djebali - C’est également une problématique d’éducation et de formation à la vente d’ETF. Les CGP doivent construire l’allocation d’actifs et offrir la solution d’investissement. C’est une façon différente d’aborder leur métier, alors qu’auparavant l’allocation d’actifs était souvent déléguée à des gérants via des fonds actifs traditionnels. 

Jean-François Bay - Les rétrocessions sont un élément important, mais pas crucial puisque les réseaux ont appris à gérer sans, notamment via les mandats de gestion ou la gestion pilotée. Ce n’est pas pour rien que des groupements de CGP se sont équipés de sociétés de gestion (Amplegest, Fourpoints, Wiseam…) pour bâtir des solutions, capter les rétrocessions, changer un peu le modèle de rémunération en proposant des solutions qui utilisent différents outils. Autre point, l’utilisation des gestions illiquides. A côté des ETF, les conseillers ont l’habitude de mettre des SCPI ou des produits structurés, ce qui permet de jouer sur les deux leviers. Par ailleurs, je suis assez surpris de constater que les ETF et la gestion indicielle sont devenus le laboratoire de l’asset management aujourd’hui. Smart beta, ESG, gestion thématique… L’offre des fournisseurs d’ETF est en constante évolution et s’adapte à la demande des investisseurs, y compris sur des sujets comme l’ESG ou la gestion thématique sur lesquels on ne les attendait pas. On peut citer également les stratégies obligataires, qui sont de plus en plus accessibles en format ETF. Sur ces segments, les ETF captent des parts de marché très importantes.

Ludovic Djebali - En ce qui concerne l’innovation, nous voyons également arriver en provenance des Etats-Unis, qui sont un marché bien en avance sur le nôtre, les portefeuilles modèles. Ils représentent aujourd’hui une partie importante de la collecte sur les ETF sur le marché américain. Dans ces portefeuilles modèles, l’allocation d’actifs va être adaptée à chaque client. Cette offre devrait intéresser les CGP et est en cours d’adoption par les clients institutionnels, qui ne disposent pas toujours des ressources nécessaires pour développer une allocation multi-actifs avec des coûts maîtrisés.

Guy Parent - Le rôle des conseillers en gestion de patrimoine n’est pas seulement de sélectionner la meilleure gestion financière. C’est même dommage quand ils se cantonnent à faire uniquement cela. Chez Vanguard, nous faisons régulièrement une étude dans plusieurs pays, « Advisor Alpha », sur tout l’alpha que peut amener un conseiller. L’étude montre que grâce au conseil fiscal, au conseil patrimonial et sur l’allocation stratégique ainsi que sur la maîtrise des biais comportementaux, l’alpha d’un conseiller est très important, alors que la partie sélection de produits financiers est tout autant un risque qu’une opportunité pour eux. Le choix d’une gestion active peut parfois mal évoluer alors que, finalement, les solutions de gestion de type ETF ou passives peuvent être très solides et très diversifiées. Une fois justement que le conseiller a travaillé avec son client sur l’allocation stratégique, c’est une manière très efficace et très robuste de construire la solution d’investissement. 

Jérémy Tubiana - Parmi les freins, il y a bien sûr celui de l’intégration des ETF dans le business model des CGP, puisqu’ils n’en font pas partie historiquement. Jusqu’à présent, il y avait aussi la problématique du référencement, mais aussi de la formation pour vendre ces produits. Les CGP mais aussi les banquiers privés ne connaissent pas toujours les ETF. Pendant de nombreuses années, on a également opposé la gestion active à la gestion passive, mais les distributeurs ont fini par comprendre que ces deux types de gestion étaient complémentaires. Dans une allocation, il est ainsi possible de combiner un fonds small caps géré activement avec un ETF sur le MSCI World pour avoir une exposition aux large caps. 

Avec le temps, les CGP se sont institutionnalisés dans leur façon de travailler. Ils intègrent les ETF comme les investisseurs institutionnels, utilisent des gestions sous mandat. Dans ce cas-là, ils délèguent la gestion financière ou vont peut-être créer des fonds dédiés. Nous constatons en effet que les CGP commencent à intégrer de plus en plus d’ETF dans leurs allocations en direct dans les contrats d’assurance-vie, mais aussi dans leurs solutions institutionnelles de mandats, de gestion pilotée ou de fonds dédiés. De façon générale, les asset managers qui gèrent des fonds diversifiés intègrent aussi des ETF. Donc, même si le CGP n’achète pas forcément des ETF en direct, il le fait peut-être via une solution dédiée de gestion pilotée ou un fonds d’allocation d’actifs d’un asset manager.

«Le développement des ETF auprès de la clientèle retail passe aussi par les réseaux de distribution, surtout via l’assurance-vie qui référence également de plus en plus d’ETF. »

Jean-François Bay Directeur général ,  Quantalys

Dans quelle optique utilisent-ils les ETF ? Uniquement pour prendre des positions tactiques ? 

Jérémy Tubiana - Je ne pense pas. Il faut distinguer le trading de l’épargne. Historiquement, on disait que les ETF étaient utilisés par les traders, mais en réalité, il s’agissait plutôt de « boursicoteurs ». Et ces boursicoteurs s’intéressaient surtout à leur épargne. Aujourd’hui, il y a cette prise de conscience qu’un ETF n’est pas un produit de trading, mais un produit d’épargne. Se positionner sur un ETF MSCI World, CAC 40 ou des ETF thématiques, c’est s’inscrire dans une perspective de long terme.

Ludovic Djebali - La France ne compte pas autant de conseillers que le Royaume-Uni ou l’Allemagne. Le développement des ETF sur le marché français va plutôt décoller grâce aux plateformes et via les plans d’épargne retraite, ces derniers bénéficiant également d’une fiscalité avantageuse. Les CGP finiront bien sûr par distribuer des ETF parce qu’il y a une pression de la part du client final, mais ça ne représente qu’une partie de la clientèle intermédiée. C’est ce que nous appelons un segment émergent en Europe, dont nous avons vu les prémices avec l’Allemagne comme on l’attendait depuis deux décennies. Cependant, même si cette clientèle émergente a un avenir radieux et va permettre d’accélérer l’intégration des ETF en Europe, le marché reste très institutionnel. 

Guy Parent - D’ailleurs, ces produits sont dimensionnés et ont des tarifs adaptés aux investisseurs institutionnels, mais tout un chacun peut bénéficier du même tarif. Il n’y a pas beaucoup d’industries dans lesquelles un particulier paie le même prix qu’un acteur de taille importante.

Est-il plus facile de choisir un ETF qu’un fonds géré activement ?

Ludovic Djebali - La démarche est différente : pour un fonds actif, l’investisseur va sélectionner un gérant – ce qui n’est pas si simple –, alors que pour les ETF, il choisit un produit. 

Jean-François Bay - Dans les bases de données Quantalys, les fonds actifs et les ETF sont mis au même niveau et classés par catégories. Le contexte de marché peut avoir une influence sur l’arbitrage entre fonds actifs et ETF, certaines phases de marché favorisent plutôt le stock-picking ou le bond-picking, d’autres phases de bull market par exemple incitent plutôt à s’exposer via des ETF. Certains marchés sont plus propices également à la gestion active (petites et moyennes valeurs, marchés émergents…).

Jérémy Tubiana - Pour un CGP, il y a moins de stress à choisir un ETF qu’un fonds actif. L’écart de performance entre deux, trois ou cinq ETF ayant la même exposition est assez limité, comparé à l’écart de performance entre plusieurs fonds actifs. 

Ludovic Dejabli - Les frais de gestion sont un des premiers critères de sélection…

Jérémy Tubiana - Avant les frais, le sujet est plutôt celui du référencement. Nous l’avons déjà évoqué, le CGP utilise principalement l’assurance-vie, donc il est contraint dans son choix par les produits qui sont référencés dans son contrat. Cette contrainte n’existe pas pour les comptes-titres, raison pour laquelle cette enveloppe commence à bien se développer en France. Il y a bien sûr d’autres critères comme les frais de gestion ou la liquidité, mais tout va dépendre finalement de l’enveloppe avec laquelle travaille le conseiller. 

Olivier Paquier - Chez AXA IM, nous avons une offre de gestion indicielle et de gestion active au format ETF. Un ETF géré activement réplique un portefeuille modèle défini par une société de gestion. Nous avons donc le choix avec notre gamme de pouvoir répliquer soit un indice externe, soit un capital intellectuel géré par AXA IM directement.

Les éléments tels que le prix ou la liquidité vont être analysés comme pour un ETF classique, ce sera la principale différence avec les fonds traditionnels ! Les frais des ETF sont toujours très regardés, y compris les frais d’exécution. Les ETF réunissent désormais le meilleur des deux mondes. Il ne s’agit plus d’opposer la gestion active à la gestion passive, mais plutôt de savoir si la gestion intègre les critères ESG ou pas, si les assets managers vont arriver à innover sur le sujet, etc. Il est intéressant de voir que, depuis le début de l’année, les ETF en gestion indicielle collectent environ 25 milliards d’euros, idem pour les ETF obligataires, actifs et les ETF ESG réunis. Nous sommes bien sur une diversification des besoins et un relais de croissance sur ce marché. Pour des investisseurs particuliers, il est intéressant aussi de pouvoir aller chercher de la surperformance ou une exposition très pure à une thématique par exemple. Cela apporte potentiellement une meilleure compréhension du marché.

Jean-François Bay - Quand les professionnels qui utilisent Quantalys analysent les ETF avant de les sélectionner, ils regardent avant tout l’indice sous-jacent, ESG ou pas, puis les frais et enfin, la taille de l’ETF/ le volume pour avoir des prix de marché plus intéressants. Par la suite, pour investir, ils regardent le référencement sur la plateforme.

Ludovic Djebali - L’évolution des ETF est intéressante. SPDR a lancé le premier ETF au monde sur le S&P 500 puis les premiers ETF sectoriels. Ces ETF constituent désormais des briques dans les portefeuilles modèles utilisés par le retail intermédié aux Etats-Unis. Nous observons également une évolution du type d’ETF utilisé. Les ETF actifs sont un nouveau segment en termes d’offre qui devrait se développer très largement. Nous observons attentivement ce qui se passe en Europe où la tendance est encore embryonnaire. Globalement, la gestion active en ETF est passée de 22 milliards en 2015 à 350 milliards en 2022 et conserve un potentiel de croissance important au niveau mondial. 

Jérémy Tubiana - En matière de sélection des ETF, les frais ne sont pas une fin en soi. C’est la performance qui importe. Quand on choisit un gérant actif sur une classe d’actifs donnée, on regarde qui gère le meilleur fonds en termes de performance. Pour un ETF, c’est la même chose. Ce n’est pas parce qu’un ETF a des frais moins élevés sur une exposition donnée qu’il va être meilleur en termes de performance.

Ludovic Djebali - Les frais de gestion sont beaucoup plus transparents que pour des fonds actifs traditionnels et ils correspondent bien au TER (total expense ratio) du produit, alors que, parfois, pour les fonds actifs, les frais s’empilent. En moyenne, un ETF est dans la plupart des cas bien moins cher qu’un fonds actif. 

Guy Parent - L’investisseur choisit son ETF en fonction des indices auxquels il souhaite être exposé, mais aussi des frais qui ont un impact important sur la performance notamment pour les indices classiques. La liquidité, et donc la taille, est aussi un critère important. 

«L’innovation ne passe pas que par le développement de nouveaux produits mais porte aussi sur les nouvelles solutions d’investissement comme les portefeuilles modèles sur les actions et obligations qui peuvent s’adapter aux contraintes spécifiques de nos clients. »

Ludovic Djebali Directeur ,  State Street Global Advisors France et responsable SPDR ETF France Belgique Luxembourg

La bataille sur les frais entre fournisseurs d’ETF est-elle terminée ? 

Jérémy Tubiana - L’offre d’ETF s’est enrichie avec de nouvelles thématiques et ces produits ne vont pas avoir le même niveau de frais qu’un ETF sur un indice classique. 

Jean-François Bay - L’innovation a calmé la guerre des prix entre fournisseurs d’ETF et l’approche low cost. Aujourd’hui, l’offre se compose de produits ESG, factoriels ou thématiques, voire d’ETF gérés activement (ou actively managed), donc des produits innovants qui se rapprochent des fonds actifs, mais cotés en Bourse et avec des frais plus élevés. La bataille entre gestion active et gestion passive est moins pertinente aussi, car les gérants actifs de leur côté ont eu tendance à baisser leurs frais en raison des pressions réglementaires tandis que les frais ont eu tendance à augmenter sur les ETF en raison des innovations. Le développement des ETF « free beta » a également eu comme conséquence de pousser les fonds actifs à devenir encore plus actifs, voire « alternatifs », avec le développement de fonds très spécialisés, « high alpha » comme les long/short equity… voire sur des stratégies illiquides (private equity…). 

On assiste à une radicalisation des deux côtés, au détriment des fonds traditionnels benchmarkés qui sont amenés à disparaître. Le match se déplace dans les réseaux de distribution autour de l’assemblage de solutions (inflation, retraite, dividende…) plus que des produits (ETF, fonds, structurés…).

Guy Parent - Nous sommes dans un métier d’économies d’échelle, les grandes expositions « vanille », qui sont par conséquent cœur de portefeuille, sont très peu chères. Mais dès qu’il s’agit de produits plus spécifiques, la taille est plus petite, la concurrence moins forte, donc les prix ne sont plus les mêmes.

Ludovic Djebali - Aux Etats-Unis, la tendance était à la compression des marges pour les blockbusters qui peuvent être à quelques points de base. Mais ce qui est très intéressant, c’est la dynamique créée en termes de modification des business models. Aujourd’hui, il est compliqué pour de nouveaux acteurs de lancer des produits sur le S&P 500 ou l’Eurostoxx 50 et d’être rentables. Donc, les nouveaux acteurs doivent se positionner sur un autre pan de marché comme les ETF de gestion active. Cette nouvelle offre intéresse également les grandes maisons qui gèrent déjà des milliards en ETF ou fonds actifs traditionnels.

Comment définissez-vous un ETF actif ? 

Olivier Paquier - Il existe plusieurs définitions de la gestion active au format ETF. La gestion quantitative permet par exemple d’apporter un biais de manière systématique dans un portefeuille via un ETF. C’est possible avec des règles systématiques quantitatives et c’est souvent la spécialité des grandes maisons françaises du quantitatif, avec des ETF apparus il y a plus de quinze ans. Pour ma part, je considère que la gestion active au format ETF est vraiment une gestion fondamentale, de stock picking. Elle suppose d’avoir une équipe de gestion qui, avec du capital intellectuel, va sélectionner les meilleures valeurs dans le but de surperformer soit un indice de référence ou d’accéder à une thématique de manière extrêmement pure. Comme nous l’avons vu avec l’investissement durable ou l’ESG en général, les clients aiment bien mélanger les deux approches. 

Un des gros atouts de la gestion active au format ETF reste le prix, non pas parce que c’est moins cher, mais parce que c’est un prix unique pour l’ensemble des porteurs. Ce que les clients apprécient. Pour les particuliers, avec de la pédagogie, nous devrions assister en Europe et en France en particulier, à une convergence en matière de gestion d’actifs, avec très probablement des conversions de fonds traditionnels de gestion active au format ETF dans les prochaines années.

Ludovic Djebali - C’est ce qui s’est passé aux Etats-Unis ces dernières années, où beaucoup d’acteurs ont converti des fonds actifs traditionnels en ETF. Ces conversions expliquent en partie la forte progression de l’encours des ETF actifs.

Olivier Paquier - Une des raisons pour lesquelles nous avons décidé chez AXA IM de lancer cette nouvelle offre d’ETF est la volonté d’atteindre les nouveaux canaux de distribution auprès d’investisseurs particuliers, dans notre cœur de marché qu’est la France, mais aussi dans d’autres pays. En effet, la digitalisation est bien adaptée pour les ETF ou inversement, on peut dire que les ETF sont bien adaptés au format digitalisé. La blockchain permet de traiter des fractionnements d’ETF, il y a une politique de règlement-livraison derrière qui est automatisée, etc., alors qu’il est plus difficile de distribuer des fonds traditionnels auprès d’acteurs digitaux, notamment les néobanques.

Ludovic Djebali - De notre expérience aux Etats-Unis, que nous essayons de transposer en Europe, nous avons identifié cinq facteurs de succès pour les ETF actifs parmi lesquels une stratégie d’investissement différenciante. Les ETF actifs doivent se distinguer de la gestion passive traditionnelle, d’autant que celle-ci est souvent disponible avec un coût très bas. Le deuxième facteur de succès concerne la performance de l’investissement et le track record. Les 20 principaux ETF actifs ont pratiquement tous délivré une surperformance sur un, trois et cinq ans. Et 19 sur 20 ont un track record supérieur à cinq ans. Troisième facteur : la marque doit être reconnue ou bien disposer d’un gérant star et dans ce cas-là, le prérequis du track record saute assez rapidement. Le quatrième facteur concerne le réseau de distribution et l’activation de ce réseau. Le succès va résider dans la capacité à gagner des parts de marché via les réseaux retail et de wealth management. La force commerciale doit être formée à la vente des ETF actifs et pas uniquement des ETF passifs. Enfin, le dernier facteur concerne l’environnement de marché et la demande client qui vont amplifier le succès des meilleurs ETF.

«Nous devrions assister en Europe et en France en particulier, à une convergence en matière de gestion d’actifs, avec des conversions de fonds traditionnels de gestion active au format ETF dans les prochaines années. »

Olivier Paquier Responsable mondial des ventes ETF ,  AXA IM

En dehors de l’essor des ETF gérés activement, quelles sont les dernières innovations ? 

Guy Parent - L’ETF est une enveloppe dans laquelle on peut mettre beaucoup d’innovations. Chez Vanguard, qui est un acteur traditionnel développant des solutions d’investissement simples, éprouvées et robustes, nous avons lancé, il y a deux ans, une gamme ETF diversifiés. Ces ETF vont mélanger des actions et des obligations selon un profil déterminé de risque. Ce sont des ETF d’ETF, avec un coût global très contraint, qui vont proposer aux clients des choix assez simples : une exposition à 20, 40, 60 ou 80 % en actions monde, et puis le reste en obligations monde couvertes du risque de change, l’allocation étant quasi fixe ou très proche de ce pivot. Ces ETF permettent de respecter des principes fondamentaux d’investissement, puisqu’on évite les biais comportementaux et le portefeuille est extrêmement diversifié et rebalancé automatiquement tout en utilisant un seul produit. L’investisseur va choisir un profil et ne va pas se mettre à vendre quand le marché actions baisse et à racheter quand les performances sont fortes. L’univers d’investissement, très diversifié, est mondial. Ces produits sont extrêmement robustes et, sur la durée, sont intéressants pour l’épargne. La gamme ETF multi-actifs compte 4 profils et rencontre du succès dans de nombreux pays.

Ludovic Djebali - En termes de produits, SPDR a lancé il y a des années une gamme sur les dividendes actions qui représente plusieurs milliards d’encours, et fort de ce succès – plus de 2 milliards de dollars collectés l’année dernière –, a décidé de proposer une offre ESG des indices S&P Dividend Aristocrats. Le développement d’ETF basés sur les indices MSCI alignés sur les accords de Paris fait partie de nos derniers lancements. Mais l’innovation ne passe pas que par le développement de nouveaux produits, elle porte aussi les nouvelles solutions d’investissement comme les portefeuilles modèles sur les actions et obligations, qui peuvent s’adapter aux contraintes spécifiques de nos clients.

Jean-François Bay - Les innovations ont surtout porté sur l’ESG avec une centaine d’ETF ESG lancés en moyenne par an, alors qu’il y a eu une rationalisation de l’offre d’ETF classiques ces dernières années.

Jérémy Tubiana - Ces innovations répondent à la contrainte des investisseurs. Avec les évolutions de MiFID, les intermédiaires vont devoir poser des questions à leurs clients sur leurs préférences durables ou pas. De facto, cela implique la nécessité d’avoir des solutions à leur disposition. En France, les investisseurs ont vraiment besoin de concret  dans leurs investissements, d’où leur appétit pour la pierre par exemple. 

Il est donc logique de voir se développer des ETF thématiques et avec une approche durable. Aujourd’hui, les investisseurs et les conseillers en gestion de patrimoine ne veulent plus faire une simple allocation d’actifs géographique ou actions/obligations. Ils commencent à intégrer les thématiques dans l’approche d’allocation. Cela permet aux intermédiaires financiers de parler autrement de la finance et surtout de répondre à leurs besoins. C’est la raison pour laquelle, chez BNPP AM, nous avons développé une large gamme d’ETF thématiques ESG. Un des derniers en date porte sur le thème de la biodiversité. Cet ETF va permettre d’investir sur les sociétés ayant l’impact le moins négatif sur la biodiversité. Pour ce faire, nous avons travaillé avec un fournisseur d’indices qui a défini un score biodiversité pour chacune des sociétés et seules les meilleures dans chacun des secteurs seront retenues. Il s’agit d’un indice Eurozone autour de la biodiversité éligible au PEA, ce qui est un point important pour les investisseurs. Tout l’intérêt de l’innovation est de répondre aux besoins des investisseurs. 

Si l’encours des ETF thématiques reste faible par rapport aux ETF actions en général (à peine 2 %), la croissance est cinq fois plus importante depuis 2018. Et la demande pour les ETF thématiques ESG ne cesse de croître, car ces produits répondent à des besoins exprimés par les clients et à l’intérêt pour des sujets tels que la lutte contre le réchauffement climatique, la préservation des océans ou l’économie circulaire.

Ludovic Djebali - Il y a une accélération des sujets ESG en Europe, qui a été pionnière dans ce domaine. Cela dit, de nombreux fonds et ETF ont récemment été déclassifiés, passant d’article 9 à article 8 selon le règlement SFDR. Chez SPDR, nous avons été d’emblée prudents et préféré ne pas classer nos ETF en article 9 afin d’observer de façon agnostique l’évolution de la réglementation. Des clients ont parfois été surpris par cette posture conservatrice alors que nos produits pouvaient être comparés à ceux de nos concurrents qui classaient les leurs en article 9, mais cette prudence a été une stratégie qui s’est avérée payante.

Olivier Paquier - En matière d’innovation, chez AXA IM, nous nous appuyons sur nos deux forces : la gestion obligataire et la gestion actions thématiques. En étant l’un des derniers acteurs arrivés dans l’industrie des ETF, l’idée était donc d’innover à partir d’expertises ayant fait leurs preuves sur le long terme. Les premiers produits lancés l’an dernier sont des ETF actifs, thématiques et ESG. Ce sont les seuls en Europe sur les thématiques du climat et de la biodiversité qui sont deux enjeux majeurs que nous nous devions d’adresser en tant que filiale d’un groupe assureur. Ces deux ETF sont basés sur des exclusions des ODD des Nations unies (et non sur de la décarbonation), ils combinent gestion quantitative pour appliquer des filtres ESG et gestion fondamentale après ce premier niveau de screening. L’idée étant aussi d’accompagner les sociétés qui ont un impact négatif sur le climat et la biodiversité via des actions d’engagement afin qu’elles s’améliorent dans le futur. Il est essentiel d’accompagner ces sociétés via des dialogues constructifs et en mettant à profit notre politique de vote pour pouvoir exercer notre influence afin que les choses évoluent positivement.

Ludovic Djebali - Nous avons une responsabilité en tant que société de gestion de proposer des solutions adaptées au changement climatique tout en étant très attentifs à la demande de nos clients. Nous pouvons nous appuyer sur l’expertise de notre société de gestion SSGA (plus de 4 000 milliards de dollars sous gestion) ainsi que sur celle de nos partenaires pour proposer des solutions adaptées aux attentes de nos clients. Nous ne pouvons négliger l’aspect financier. Pour que cette offre soit durable, il faut que les produits soient rentables, c’est-à-dire achetés et non pas seulement vendus. Il faut donc faire attention de ne pas créer un stock d’ETF déconnecté de l’environnement ou de la demande, au risque d’entraîner ensuite des fermetures de produits. 

Par ailleurs, la sélection d’un ETF ESG s’avère très compliquée, y compris pour un investisseur institutionnel, car la façon d’intégrer l’ESG diffère d’une société de gestion à l’autre. Nous avons développé une solution qui prend en compte les principales sources de données extra-financières et identifie les points forts de chacune pour créer des ETF de seconde génération sur les actions et obligations.

«Les ETF cochent toutes les cases que recherche la génération “do it yourself” : ce sont des produits simples, transparents, liquides et avec des frais réduits. »

Jérémy Tubiana Responsable du développement ETF & solutions indicielles France, Belgique, Luxembourg, Monaco et Suisse francophone ,  BNPP AM

En synthèse de ces échanges, êtes-vous confiants sur le potentiel de croissance des ETF auprès de la clientèle retail intermédiée ?

Olivier Paquier - Selon les chiffres de l’EFAMA sur le marché retail, 5 % des Français sont investis dans des produits cotés aujourd’hui en Bourse contre 8 % des Européens et 15 % des Américains. Cela montre bien le potentiel de croissance de la gestion intermédiée en France. Et les ETF, qu’ils soient actifs ou passifs, ont un rôle intéressant à jouer pour deux raisons : d’une part, les intermédiaires n’ont plus toujours le temps, la patience et l’accès aux données nécessaires pour sélectionner des fonds complexes, et d’autre part, avec les ETF actifs, ils retrouvent un environnement familier avec les mêmes points d’attention et de sélection que pour les fonds traditionnels. Contrairement à la gestion indicielle, les ETF actifs peuvent peut-être ouvrir des portes pour le marché des ETF en général. Par ailleurs, les clients ont aujourd’hui besoin d’être rassurés et les ETF, en gestion indicielle ou en gestion active, ont tous les mêmes qualités aujourd’hui : la transparence, la liquidité, l’accessibilité et le prix. Les ETF dans leur ensemble répondent bien aux attentes des particuliers.

Jérémy Tubiana - Un rapport de l’AMF confirme cette tendance : le nombre de transactions en ETF a atteint son plus haut niveau au premier trimestre 2023. Et les chiffres de collecte en assurance-vie sur la partie ETF sont assez impressionnants. Les assureurs s’intéressent de plus en plus à ce sujet. La démocratisation de l’offre est une tendance d’avenir et les ETF font désormais partie intégrante de la gestion patrimoniale pour les clients particuliers et les intermédiaires financiers. 

Jean-François Bay - Les conditions de marché rendent plus complexe la construction d’une allocation d’actifs et d’une sélection de fonds et de titres. Cela plaide en faveur de solutions d’investissement capables de traverser les crises. C’est la force des grands réseaux de conseillers et des réseaux distributeurs de pouvoir aller sur ce type de solutions, comme nous l’avons vu avec le PER et la gestion pilotée. L’inflation constitue le deuxième élément fondamental de ce nouveau paradigme puisque les clients sont obligés d’investir. L’investisseur ne peut pas rester indéfiniment en cash et absent du marché. Il va donc se tourner vers la gestion intermédiée et les distributeurs pour y voir plus clair et trouver des solutions. Enfin, le troisième levier vient de la digitalisation de notre industrie qui va également favoriser l’essor des ETF.

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